Dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, les réformes peuvent réalimenter les moteurs de la croissance
La croissance s’améliore légèrement dans les pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, essentiellement tirée par une hausse des cours du pétrole et une amélioration des perspectives d’exportation. Les conflits civils et le chômage élevé continuent cependant de peser sur les perspectives régionales.
Le FMI souligne dans les Perspectives économiques régionales pour le Moyen-Orient et l’Asie centrale qui sortent le 2 mai à Dubaï que les pays devront poursuivre leurs plans de diversification de l’économie et continuer à mettre en œuvre des politiques en faveur de l’emploi et la productivité, notamment des réformes dans l’éducation et les infrastructures.
« Ce climat mondial plus favorable, qui s’accompagne d’un certain affermissement des cours des produits de base, offre un répit salutaire à la région, après une période qui a été difficile » a déclaré Jihad Azour, Directeur du Département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI lors de la présentation du rapport à Dubaï.
« Nos projections indiquent cependant que la croissance sera trop faible pour créer suffisamment d’emplois ou améliorer le niveau de vie. Bon nombre de pays, en particulier les importateurs de pétrole, affichent aussi une dette élevée ». Tant les pays exportateurs que les pays importateurs « sont confrontés à deux impératifs : assainir les finances publiques et opérer des réformes structurelles » a-t-il souligné.
La croissance reprend
D’après les projections, la croissance globale des pays importateurs de pétrole de la région devrait être portée de 3,7 % (voir le tableau) en 2016 à 4 % en 2017, essentiellement grâce aux politiques qui ont réduit les déficits budgétaires et amélioré le climat des affaires, comme au Maroc et au Pakistan. Dans les pays exportateurs de pétrole, la croissance hors pétrole devrait aussi s’accélérer et passer de 0,4 % en 2016 à 2,9 % en 2017, même si les baisses de production à la suite de l’accord de l’OPEP/non-OPEP vont provisoirement réduire la croissance globale.
La croissance prévue dans les pays importateurs de pétrole ne sera pas suffisante pour faire reculer sensiblement le taux de chômage élevé de la région, qui s’établit à 12 % environ. Dans les pays exportateurs de pétrole de la région, les ajustements de la politique économique comme les réductions des dépenses publiques vont continuer de freiner l’activité économique. De plus, les conflits risquent de peser encore sur la région.
Les déficits s’améliorent
Même si les déficits budgétaires ont diminué dans les pays exportateurs de pétrole, les efforts de réduction des déficits doivent se poursuivre en tirant parti des progrès déjà réalisés dans la réduction des dépenses, notamment en Algérie et en Arabie saoudite. D’après le rapport, les déficits budgétaires devraient être ramenés de 10 % du PIB en 2016 à moins de 1 % en 2022, ce qui représente une amélioration sensible qui contribuera à renforcer la résilience.
La situation des finances publiques s’est également améliorée dans les pays importateurs de pétrole. Dans l’ensemble de la région, le déficit budgétaire moyen a été ramené de 9 ¼ % du PIB en 2013 à 7 % environ du PIB en 2016, en grande partie grâce à la réduction des subventions des combustibles (Égypte, Maroc, Soudan) et aux efforts d’augmentation des recettes et de renforcement de la perception des impôts (Pakistan).
La dette publique demeure cependant élevée, et le ratio dette/PIB est supérieur à 90 % dans certains pays importateurs de pétrole. Les coûts liés au service de la dette (qui sont particulièrement élevés en Égypte, au Liban et au Pakistan) vont vraisemblablement augmenter, au rythme de la hausse prévue des taux d’intérêt dans le monde. De plus, l’endettement élevé rebute les investisseurs et accroît les risques d’instabilité financière.
Les coûts accrus du service de la dette vont exercer de nouvelles pressions sur la situation des finances publiques et réduire la marge de manœuvre pour financer les dépenses publiques porteuses de croissance, dans les infrastructures et l’éducation par exemple. Il faut poursuivre l’ajustement budgétaire, qu’il faut favoriser par des efforts de renforcement des recettes fiscales en élargissant la base d’imposition, et mener à bien les réformes des subventions.
Des réformes pour relancer la création d’emplois
Les pays exportateurs de pétrole de la région doivent poursuivre leur diversification et réduire la place des hydrocarbures au profit d’autres secteurs afin de rendre la croissance régulière et durable. Les visions stratégiques des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite montrent une ferme volonté de diversifier les investissements et de trouver de nouvelles sources de recettes. Il faut compléter ces plans par des politiques visant à renforcer le rôle du secteur privé—comme l’ouverture récente du centre d’affaires au Koweït—et à attirer davantage d’investissements étrangers.
Dans les pays importateurs de pétrole, la croissance reste trop faible pour faire reculer le chômage. De plus, les autorités ont une marge de manœuvre limitée pour engager des dépenses. Pour favoriser l’activité du secteur privé et stimuler l’emploi, les autorités peuvent donner des possibilités de formation et d’éducation, accroître le taux d’activité féminine (par une budgétisation sensible au genre comme au Maroc) et renforcer les règles de protection des investisseurs, comme en Jordanie et en Mauritanie.
Le coût des conflits
Les conflits régionaux en cours, qui se sont traduits par un grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées, continuent d’avoir un coût humanitaire élevé, mais aussi de graves conséquences économiques, tant dans les pays directement affectés par un conflit que chez leurs voisins.
« Nous savons que les conflits demeurent une préoccupation majeure pour les pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, et le FMI partage cette préoccupation » a déclaré Jihad Azour.
De concert avec des partenaires internationaux, le FMI aide les pays touchés par un conflit à faire face aux conséquences économiques défavorables immédiates et se tient prêt à soutenir les efforts de reconstruction une fois que les conflits s’apaisent. Ainsi, il apporte une assistance technique de grande ampleur en Somalie et une aide financière à l’Afghanistan et à l’Iraq.
« La responsabilité d’améliorer la situation humanitaire et économique dans les parties de la région touchées par des conflits n’incombe pas seulement aux pays ; c’est un impératif international », a-t-il affirmé.