La croissance hors pétrole s’accélère dans les pays exportateurs de pétrole, tandis qu’une reprise fragile se poursuit dans les pays importateurs de pétrole de la région Moyen-Orient, Afrique du Nord, Afghanistan et Pakistan (MOANAP), note le FMI dans son dernier rapport sur les Perspectives économiques régionales.
« Afin de tirer pleinement parti de l’expansion de l’économie mondiale, la région doit accélérer les réformes économiques cruciales. Il faudrait en priorité améliorer le climat d’investissement, stimuler la productivité et renforcer la gouvernance », selon Jihad Azour, directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI.
1 – La croissance repart, mais pas assez rapidement, et les gains sont fragiles
La croissance du PIB réel de 1,7 % enregistrée en 2017 par les pays exportateurs de pétrole a été beaucoup plus faible qu’en 2016, ce qui s’explique par les réductions de la production pétrolière prévues par l’accord OPEP+. Toutefois, dans les pays exportateurs de pétrole, la reprise généralisée de l’activité non pétrolière s’est poursuivie, en partie en raison d’un ajustement budgétaire plus lent. Avec l’expiration de l’accord OPEP+ et la reprise de la production pétrolière, la croissance devrait s’accélérer cette année et l’année prochaine. Néanmoins, la croissance annuelle de 3,6 % projetée à moyen terme (2019–23) dans les pays exportateurs de pétrole resterait de loin inférieure aux niveaux d’avant le choc pétrolier de 2014.
En revanche, la croissance des pays importateurs de pétrole était de 4,2 % en 2017 et devrait atteindre 4,7 % en 2018, avant de monter à environ 5 % en 2019–23.
Cependant, ces niveaux de croissance ne créeront pas suffisamment d’emplois pour réduire le chômage, en particulier parmi les jeunes de la région, dont environ 23 % sont sans emploi.
2 – Pourquoi la région ne profite pas pleinement de la reprise mondiale
Des niveaux d’endettement élevés ou en croissance rapide ont obligé les pays à prendre d’importantes mesures de réduction des dépenses publiques et de mobilisation des recettes en vue de résorber les déficits. Ces mesures permettront à la région de préserver la santé de son économie, de maîtriser la dette et l’inflation, et de créer un environnement propice à une croissance durable et inclusive. Cependant, elles peuvent également freiner la croissance économique.
Par ailleurs, les pays de la région doivent davantage s’intégrer à l’économie mondiale et diversifier leurs produits et services. À cet effet, il faudra accroître l’accès au crédit pour le secteur privé (surtout les petites et moyennes entreprises) et améliorer les compétences de la main-d’œuvre.
L’incertitude autour des cours du pétrole, l’aggravation des tensions commerciales et les effets des conflits actuels et de leurs retombées entravent davantage la croissance et font peser des risques sur l’avenir.
3 – Des politiques budgétaires et monétaires vigoureuses sont importantes, mais insuffisantes pour stimuler la croissance
L’augmentation de la dette limitera la capacité de la politique budgétaire à doper la demande à court terme. Alors que les pays s’emploient à ramener leur endettement à des niveaux raisonnables, ils doivent songer à élargir l’assiette fiscale et à améliorer l’efficience des dépenses, notamment en achevant la réforme des subventions. Cela leur permettra de surmonter les difficultés budgétaires actuelles et de dégager des économies qui pourraient être consacrées à des domaines de dépenses prioritaires tels que la santé, l’éducation et l’investissement public.
Il sera essentiel de renforcer la crédibilité de la politique monétaire afin d’ancrer les anticipations inflationnistes. Dans ces circonstances, la marge de réduction des taux d’intérêt pour stimuler la croissance économique sera restreinte, même si l’inflation s’atténue. Étant donné leur régime de parité fixe, les pays du Conseil de coopération du Golfe devront adapter leur politique monétaire à la hausse prévue des taux directeurs aux États-Unis, ce qui grèvera la croissance.
4- Il est crucial d’accélérer les réformes structurelles
Les pays de la région doivent profiter de la reprise mondiale pour accélérer les réformes structurelles qui réduiront leur dépendance aux matières premières et contribueront à dynamiser le secteur privé. Les réformes doivent mettre l’accent sur des mesures qui améliorent le climat des affaires, comme les efforts récemment déployés par le Pakistan en vue de renforcer son régime des faillites. Des réformes du marché du travail et de l’éducation s’imposent également pour stimuler la productivité.
Il conviendra de renforcer la gouvernance et la transparence afin de promouvoir la croissance inclusive dans la région. Certains pays prennent des mesures louables dans ce sens. À titre d’exemple, l’Afghanistan a récemment adopté une loi qui criminalise les actes de corruption, et des lois relatives à la lutte contre la corruption sont entrées en vigueur au Maroc, en Somalie et en Tunisie.
5 – La croissance doit être source de débouchés pour tous
Les pays doivent s’assurer que la croissance soit partagée par tous. Les Perspectives économiques régionales notent qu’il existe déjà des exemples encourageants. Les Émirats arabes unis ont considérablement investi dans l’éducation et l’innovation et l’Iran a conçu des programmes de création d’emplois en faveur des jeunes et des femmes, des groupes souvent laissés-pour-compte dans la région. Récemment, le Maroc a lancé un programme visant à améliorer la qualité de l’éducation et de la formation professionnelle et à accroître le taux d’activité des femmes, tandis que l’Égypte a doublé le budget alloué aux garderies publiques en vue de favoriser l’insertion professionnelle des femmes. Ces mesures sont à saluer, même s’il reste beaucoup à faire à travers la région pour amplifier ces efforts et accélérer les progrès.