Le président du Groupe de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina se joindra aux dirigeants du monde entier à la 77e session de l’Assemblée générale des Nations unies à New York pour traiter de défis mondiaux tels que l’impact du changement climatique, la guerre de la Russie en Ukraine ou la reprise après la pandémie de Covid-19.
Les régions en développement de la planète qui sont les plus durement touchées par le changement climatique, notamment l’Afrique, mettent en garde contre le risque de voir se transformer la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP27) qui se tiendra dans deux mois à peine en Égypte, en simple causerie où l’on ferait ses emplettes en promesses.
Le président du Groupe de la Banque africaine de développement, M. Akinwumi Adesina, et les intervenants de la deuxième réunion ministérielle sur le climat et le développement, qui s’est tenue mardi à New York en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, ont douté de la détermination des pays développés à tenir les promesses qu’ils ont faites lors de la COP26 à Glasgow dans le cadre de l’accord de Paris de 2015.
Ils ont appelé à une action urgente pour lever des fonds pour les nations les plus vulnérables du monde.
Les participants à cette réunion de haut niveau souhaitent que les objectifs relatifs au climat et à la nature soient intégrés dans les politiques financières et économiques et que des mesures importantes soient présentées lors de la COP27 en novembre.
« Nous sommes en retard. Nous devons agir. J’en ai assez de dire la même chose trop souvent dans les mêmes réunions. Le statu quo est notre ennemi commun. Il est temps d’agir », a déploré l’envoyé américain pour le climat, John Kerry, ajoutant : « Nous travaillons sur quelque chose de sérieux que nous présenterons à Charm el-Cheikh. »
Le sénateur Kerry a évoqué ses récents voyages au Nigéria et au Sénégal, qui font partie des 48 pays subsahariens responsables de moins de 0,55 % aux émissions de gaz à effet de serre et qui souffrent pourtant de manière disproportionnée des effets du changement climatique.
Estimant que le monde devait aborder la COP 27 en changeant sa façon de faire des affaires, il a appelé à impliquer le secteur privé pour lever les financements nécessaires à la lutte contre le changement climatique. « Le climat et le développement vont de pair. La question à se poser est : où est l’argent ? Toutes les promesses sont restées à Paris. »
M. Adesina a dépeint la réalité du changement climatique dans certains des pays africains qu’il a récemment visités, qualifiant ce qu’il a vu de véritable crève-cœur.
« Au Cabo Verde, ils n’ont pas eu de pluie depuis près de trois ans. En Mauritanie, de vastes zones sont désertes en raison du manque de précipitations », a témoigné le président de la Banque africaine de développement.
M. Adesina a partagé son indignation avec les participants : « L’Afrique souffre, elle suffoque et se trouve dans une grave détresse financière à cause d’événements qu’elle n’a pas provoqués. Il doit y avoir un plus grand sens de l’urgence, non pas dans les discours, mais dans l’action et la mise à disposition des ressources dont le continent a désespérément besoin. »
Il a invité le monde à se montrer à la hauteur de la COP 27, la COP de l’Afrique : « Nous devons répondre aux attentes. S’il y a des résultats à obtenir, c’est bien en matière d’adaptation. Nous avons désespérément besoin de financements pour l’adaptation. »
M. Adesina a parlé du Programme d’accélération de l’adaptation en Afrique, dirigé par la Banque africaine de développement, qui est en train de mobiliser 25 milliards de dollars de financements pour soutenir le continent à grande échelle.
Les intervenants ont plaidé en faveur d’une stratégie coordonnée impliquant les bailleurs de fonds, les partenaires et le secteur privé qui travailleraient ensemble pour financer le changement climatique, et en particulier l’adaptation. En outre, ils ont exhorté les pays à honorer leurs promesses faites lors de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques de 2021 à Glasgow.
« L’adaptation ne reçoit jamais l’attention qu’elle mérite », a regretté Bill Gates, cofondateur de la Fondation Bill et Melinda Gates. « Nous devons nous assurer que nous finançons les choses qui ont le plus d’impact », a-t-il exhorté.
Il a estimé que la succession de mauvaises conditions météorologiques cette année ne permettait plus d’ignorer le défi du changement climatique. Il a souligné l’urgence d’agir, notamment en investissant dans les technologies et les scientifiques des pays en développement.
« C’est fantastique que l’objectif soit de doubler le montant des fonds consacrés à l’adaptation d’ici 2025 pour atteindre 40 milliards de dollars. Ces 40 milliards de dollars devraient prioritairement cibler les pays à faible revenu. Les besoins y sont assez dramatiques. La question se pose de savoir comment nous définissons cette somme compte tenu de ces événements climatiques et de leurs effets sur l’agriculture… »
Il a ajouté : « Je ne crois pas que la communauté internationale est en train de nous dire que nous devrions dépenser moins pour les vaccins afin de financer l’adaptation au climat… Nous estimons plutôt que cet argent doit s’ajouter au budget de l’aide. »
Mme Jeanne d’Arc Mujawamariya, ministre rwandaise de l’Environnement et coprésidente de la réunion, s’est fait l’écho de la voix des jeunes lors de cette réunion.
Elle a déclaré : « Comme vous pouvez le constater, les jeunes sont inquiets pour leur avenir. Profitons de la réunion ministérielle d’aujourd’hui pour apprendre les uns des autres et partager des actions concrètes et tangibles qui rendront les jeunes fiers de nous. Nous sommes ici ensemble, travaillant main dans la main pour faire face à la crise climatique et assurer un avenir radieux à nos jeunes. »
Vinzealhar Ainjo Nen, une jeune activiste climatique de Papouasie–Nouvelle-Guinée, a souligné la réalité de la situation dans son pays.
« La Papouasie–Nouvelle-Guinée est l’une des nombreuses nations insulaires qui subissent les conséquences de la crise du climat et de la nature — longues sécheresses, îles submergées et j’en passe. Mon peuple et moi-même vivons quotidiennement dans ces conditions », a-t-elle déclaré lors de la réunion.
Faisant référence à ce qu’elle a décrit comme un processus juridique long et compliqué pour accéder aux fonds climatiques au niveau national et international, elle a observé : « Je dois souligner que mère nature ne fonctionne pas dans des cadres juridiques, et nous n’avons pas de temps à perdre. »
Simon Stiell, secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, a rappelé la nécessité de ce qu’il a appelé « une série d’actions » pour mobiliser des financements.
« Nous devons mettre toute l’architecture en branle. Les catastrophes climatiques se présentent de plus en plus sous diverses formes. Nous sommes officiellement dans une décennie de mesures décisives », a-t-il rappelé à l’assemblée.
Le Rwanda et la présidence britannique de la COP 26 ont coprésidé la deuxième réunion ministérielle sur le climat et le développement afin d’examiner les progrès accomplis depuis la COP 26, la Conférence des Nations unies sur le changement climatique, et de promouvoir une action mondiale transformatrice en matière de climat.
Cette réunion a rassemblé plus de 30 pays et des représentants de l’ONU, de la Banque mondiale, de la Banque africaine de développement et du FMI afin d’évaluer les domaines dans lesquels des progrès peuvent être réalisés en ce qui concerne les priorités des pays vulnérables au changement climatique et de mettre en œuvre des mesures de lutte contre le changement climatique.