Le ministre des Finances britannique, Jeremy Hunt, doit présenter jeudi un projet budgétaire et fiscal censé faire oublier l’expérience chaotique du gouvernement de Liz Truss, en combinant des coupes dans les dépenses et des hausses d’impôts pour tenter de regagner la confiance des marchés.
La tâche est d’autant plus ardue que la Grande-Bretagne est sans doute déjà en récession, que l’inflation est au plus haut depuis 1981 et que son économie est la seule du G7 à ne pas avoir retrouvé son niveau d’avant la pandémie.
Jeremy Hunt, sans révéler le contenu de son projet, a déjà averti qu’il serait douloureux pour certains, laissant entendre qu’il prendrait l’exact contre-pied de la politique d’allègements fiscaux massifs mais non financés amorcée par Liz Truss et son éphémère ministre Kwasi Kwarteng.
Leur « mini-budget » présenté le 23 septembre avait fait chuter la livre sterling et bondir les rendements des emprunts d’Etat comme les taux d’intérêts des crédits immobiliers. Une tempête financière qui a fini par pousser Liz Truss à la démission le 20 octobre.
Les marchés financiers ont ensuite bien accueilli la nomination de Jeremy Hunt, perçue comme un gage de retour à l’orthodoxie budgétaire.
D’autant que le nouveau chancelier de l’Echiquier et le Premier ministre, Rishi Sunak, ont rapidement expliqué que le pays avait besoin d’une cure d’austérité budgétaire.
« Le Royaume-Uni a renoué avec la stabilité mais cela est dû au fait que l’on attend du gouvernement qu’il prenne ces décisions difficiles mais nécessaires », a ainsi déclaré le Premier ministre à Sky News cette semaine.
Déjà, les critiques soulignent que le retour de l’austérité ne fera qu’accroître les difficultés qui touchent des millions de ménages tout en aggravant la récession.
Un argument auquel Jeremy Hunt réplique en soulignant qu’il peut freiner l’augmentation du coût des crédits s’il parvient à convaincre les investisseurs que le gouvernement peut, à terme, faire baisser le poids de la dette publique, qui avoisine aujourd’hui 2.450 milliards de livres.
SUNAK PREND LE RISQUE DE TENSIONS POLITIQUES ET SOCIALES
Le gouvernement vise plus de 50 milliards de livres d’économies annuelles d’ici cinq ans, l’équivalent de 2% du produit intérieur brut (PIB).
Cette stratégie risque cependant de raviver les tensions au sein du Parti conservateur, dont une partie des membres avait déjà protesté contre l’ampleur des hausses d’impôts et de taxes annoncées par Rishi Sunak lorsque ce dernier était ministre des Finances.
Jeremy Hunt pourrait entre autres geler le barème de l’impôt sur le revenu, ce qui aurait pour effet de rendre imposable des milliers de ménages, tout en abaissant le seuil de la tranche d’imposition la plus élevée, ce qui élargirait son assiette.
Des médias ont rapporté qu’il souhaitait aussi augmenter les recettes fiscales tirées de la taxation des dividendes et des plus-values.
Le ministre s’est pour l’instant contenté de déclarer que les plus aisés devaient s’attendre à être les plus sollicités.
Concernant les entreprises, plusieurs sources ont évoqué la piste d’une importante augmentation de la taxation exceptionnelle des profits des compagnies pétrolières et gazières, ainsi que son extension aux producteurs d’électricité.
Côté dépenses, les coupes à venir risquent d’ajouter à la colère d’une partie de l’opinion publique et des fonctionnaires, car elles pourraient toucher aussi bien la santé, déjà sous tension, que le logement social.
Cette situation favorise l’opposition dans les sondages, qui donnent le Parti travailliste largement en tête des intentions de vote pour les législatives prévues en 2024.
Une fois ajustés de l’inflation, les budgets de nombreux ministères sont déjà inférieurs à leur niveau de 2010, la baisse atteignant près de 40% pour les transports et 20% pour la justice.
Parallèlement au projet budgétaire, le gouvernement publiera de nouvelles prévisions économiques de l’Office for Budget Responsibility, un organisme indépendant, qui devrait confirmer le scénario de récession.