Les banques de la zone euro doivent être plus sélectives vis-à-vis des clients qui se livrent à des paris risqués sur les marchés financiers, comme les fonds spéculatifs (hedge funds), et se montrer davantage prudentes quant à leur exposition à ces fonds, a déclaré vendredi la Banque centrale européenne (BCE).
Cette mise en garde de la BCE souligne les inquiétudes de l’institut de Francfort sur les établissements financiers non bancaires qui représentent actuellement près de la moitié du système financier mondial.
Le développement du secteur financier non-bancaire, évalué à environ 240.000 milliards de dollars selon le Conseil de stabilité financière (FSB) du G20, s’est accéléré après la crise financière mondiale, les banques traditionnelles étant soumises à une réglementation plus stricte.
Andrea Enria, le responsable de la supervision du secteur bancaire au sein de la BCE, a exhorté vendredi les banques à faire preuve de davantage d’exigence envers leurs clients non-bancaires comme les hedge funds et les sociétés de négoce qui effectuent des emprunts auprès des banques traditionnelles pour se livrer à des activités risquées et moins réglementées.
Pour lui, les banques doivent dire « non » lorsqu’elles jugent une opération trop risquée.
« L’incapacité d’un client à fournir des informations devrait se traduire par une approche plus conservatrice en matière de garanties, de marges et de limites, voire le rejet ou l’exclusion de ce client », écrit-t-il dans un blog.
Andrea Enria souligne que la BCE a constaté que la faiblesse des taux d’intérêt (ils étaient négatifs jusqu’en juillet 2022, NDRL) a « incité certaines banques à augmenter le volume des capitaux accordés à des établissements plus exposés et moins transparents, dont des institutions financières non bancaires comme les fonds spéculatifs et les bureaux de gestion de patrimoine (« family offices »).
L’EXEMPLE ARCHEGOS EN 2021
Après la faillite d’Archegos en 2021, qui a entraîné des pertes importantes pour le Credit Suisse et d’autres banques, la BCE a procédé à un examen de la gestion du risque par les banques de la zone euro sur les produits dérivés.
L’institution de Francfort a également examiné les liens entre les banques et les négociants en matières premières ainsi que les entreprises du secteur de l’énergie dans un contexte de volatilité sur ces marchés après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
Selon Andrea Enria, la BCE a depuis constaté « quelques progrès » mais également « plusieurs insuffisances importantes », allant du montant des garanties exigées par les banques à leurs clients aux conditions juridiques de leurs contrats.
Andrea Enria a assuré que la BCE « utiliserait toute la gamme des outils de supervision dont elle dispose pour s’assurer que les banques en question remédient rapidement aux insuffisances (constatées) ».
La BCE peut formuler des exigences dites « qualitatives », par exemple demander à une banque de renforcer ses contrôles, mais aussi augmenter les exigences en matière de fonds propres et de liquidités si elle estime que ses demandes n’ont pas été prises en compte.