L’activité a fléchi cet hiver, le PIB reculant au T4-22 et au T1-23. En 2023, l’économie se contractera légèrement, avant de modérément repartir en 2024-25.
Cette année, l’inflation, la hausse rapide des taux d’intérêt sur les crédits immobiliers et le débouclage des dernières mesures anti-covid vont freiner la demande intérieure.
En parallèle, les exportations n’apporteront plus le même soutien que par le passé : les exportations vers la Chine n’ont pas repris aussi fortement qu’attendu et les secteurs de l’automobile et de la chimie peinent à rebondir. En 2024-25, l’inflation retomberait sous le seuil de 3 % et les taux d’intérêt baisseraient quelque peu, ce qui permettrait à la croissance de modestement repartir, tout en restant sous son rythme potentiel. La balance des risques reste dégradée. A court terme, malgré les mesures gouvernementales, l’industrie et les ménages resteront exposés à une nouvelle envolée des prix de l’énergie. A plus long terme, la compétitivité de l’économie allemande, sa capacité d’exportation et son potentiel de croissance risquent d’être mis à mal par les défis qu’impose la transition énergétique à son industrie.
La croissance des exportations sera plus modeste sur l’horizon de prévision qu’avant la pandémie. Les excédents courants allemands resteront considérables, mais moins qu’auparavant. Dans les économies développées, le rééquilibrage de la consommation des biens vers les services dans le sillage de la pandémie pénalisé au cours des derniers trimestres les exportations allemandes de biens manufacturiers.
En outre, le manque de composants et l’envolée du prix de l’énergie ont fortement contraint l’offre dans le secteur industriel, particulièrement dans l’automobile et la pétrochimie. Enfin, la reprise en Chine a été modérée et les tensions géopolitiques restent un frein. En 2023, la croissance des exportations restera modérée du fait d’une économie mondiale considérablement ralentie par le resserrement des politiques économiques. A plus long terme, leur rythme d’expansion sera certainement plus modéré que par le passé. En effet, l’Allemagne est confrontée au défi structurel d’assurer la transition énergétique dans plusieurs secteurs clés, tels que la chimie, l’acier ou l’automobile, ce qui risque de nuire à la compétitivité de son industrie. Au total, l’Allemagne affichera à nouveau des excédents courants cette année (ils avaient presque intégralement disparu en 2022 à cause de la forte augmentation du prix des importations énergétiques), mais ces derniers seront certainement moins importants à moyen terme que par le passé.
Les dépenses d’investissement, qui n’ont toujours pas retrouvé leur niveau prépandémique, diminueront en 2023. Leur reprise sera modeste en 2024-25. Du côté des entreprises, la croissance de l’investissement productif sera faible cette année malgré une profitabilité qui reste bien orientée et l’importance des capacités de financement. En effet, les budgets pour 2023 ont été réalisés à l’automne dernier au pic de la crise énergétique, lorsque la confiance des chefs d’entreprises était fortement dégradée. De plus, les contraintes d’offre demeurent : les délais d’approvisionnement
sont revenus à la normale, mais le prix des biens d’équipement reste élevé.
Une reprise modérée devrait s’observer à partir de 2024. L’investissement résidentiel, quant à lui, subit de plein fouet la forte hausse des taux d’intérêt sur les crédits immobiliers et la hausse du coût des matériaux. Un nouveau repli, après celui enregistré en 2022, est à attendre. Une reprise se dessinerait en 2024-25 avec l’ajustement des prix à venir.
Les ménages vont réduire leurs dépenses de consommation en 2023. Elles se redresseraient progressivement en 2024-25 avec le reflux de l’inflation. L’inflation énergétique et les comportements de précaution ont conduit les ménages à fortement diminuer leur consommation cet hiver, laquelle entame 2023 3 % sous son niveau de 2019. Un rebond est attendu à partir du T2-23, par effet de rattrapage, mais aussi grâce à la désinflation et à la résilience du revenu nominal malgré la faible croissance attendue de l’emploi et la remontée du taux de chômage. Le bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement et une nouvelle baisse du taux d’épargne seront également des soutiens. Cependant, du fait de l’ampleur du recul observé au T4-22 et au T1-23, la croissance de la consommation sera certainement négative sur l’ensemble de l’année. En 2024-25, la désinflation autoriserait un rebond modeste.
En 2023, la trajectoire des finances publiques dépendra de l’évolution du prix de l’énergie du fait du bouclier tarifaire mis en place par le gouvernement. Au-delà, la consolidation budgétaire se poursuivra et le ratio d’endettement public se stabiliserait sur l’horizon de prévision. En 2023, le gouvernement table sur un creusement de presque 2 points du déficit en raison des décaissements du Fonds de stabilisation alloués aux subventions énergétiques. Beaucoup d’incertitude plane toutefois sur le montant effectif de ces futurs versements, puisqu’ils dépendront de l’évolution des prix de l’énergie. Au-delà, le déficit public devrait graduellement être réduit et permettre une stabilisation du ratio d’endettement public en 2025 malgré la faiblesse de la croissance. Pour ne pas remettre en cause la règle d’or des finances publiques, l’essentiel des nouvelles dépenses récemment annoncées par le gouvernement (défense et transition écologique) sera réalisé par des entités dont le bilan n’est pas consolidé au budget fédéral.
L’inflation a atteint son pic en 2022, mais restera élevée en 2023 avant de refluer sous le seuil de 3 % en 2024-25. La baisse des prix de l’énergie sur les marchés de gros et les différentes mesures gouvernementales ont conduit à la désinflation énergétique au cours des derniers mois. En 2023, le bouclier tarifaire permettra d’écarter le scénario d’une hausse des prix aussi forte celle observée en 2022. Cependant, une désinflation plus rapide est empêchée par la rapide hausse des prix alimentaires et celle, moins forte mais persistante, des prix des biens manufacturiers et des services.
La désinflation des biens apparaît cependant en cours au regard des prix de production dans l’industrie et si les hausses de salaires soutiendront dans un premier temps les prix dans les services, le ralentissement de la demande permettra une normalisation de l’inflation sur l’horizon de prévision.
La balance des risques entourant le scénario de croissance s’est améliorée, mais reste dégradée. A court terme, ménages et entreprise restent exposés à une nouvelle envolée des prix énergétique, les subventions du bouclier tarifaire ne couvrant qu’un volume limité de consommation d’électricité (80 % du volume observé en 2021). A plus long terme, les défis posés par la transition écologique à l’industrie allemande font peser un risque sur la croissance potentielle.