La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a confirmé, ce jeudi, l’annulation d’une amende historique de 1,06 milliard d’euros infligée au géant américain des microprocesseurs, Intel. Cette amende avait été imposée en 2009 par la Commission européenne, qui reprochait à Intel d’avoir abusé de sa position dominante sur le marché des processeurs x86 en offrant des rabais dits « de fidélité » à plusieurs grands fabricants d’ordinateurs.
À l’origine, la Commission européenne avait jugé que ces rabais étaient conditionnés à l’achat de la quasi-totalité des processeurs par ces fabricants auprès d’Intel, créant ainsi une concurrence déloyale. Les entreprises visées par ces pratiques incluaient certains des plus grands noms de l’industrie informatique, tels que Dell, Hewlett Packard (HP), NEC et Lenovo. Selon la Commission, en incitant ces fabricants à limiter leur recours aux processeurs de ses concurrents, Intel aurait écarté les autres acteurs du marché, en particulier son principal rival de l’époque, Advanced Micro Devices (AMD).
Cependant, en 2022, le Tribunal de Justice de l’Union européenne (TUE), la deuxième plus haute juridiction du bloc, avait annulé cette sanction après avoir réexaminé l’affaire. Le Tribunal avait estimé que la Commission n’avait pas apporté de preuves suffisantes démontrant que les rabais d’Intel avaient effectivement eu un impact anti-concurrentiel sur le marché, justifiant ainsi l’annulation de l’amende. Cette décision avait alors poussé la Commission européenne à faire appel auprès de la CJUE, qui est la plus haute instance juridique de l’Union.
La décision de la CJUE, rendue en octobre 2023, confirme l’arrêt du TUE, rejetant ainsi l’appel de la Commission. Ce jugement met fin à une bataille judiciaire qui aura duré plus d’une décennie, et constitue un revers significatif pour les régulateurs européens. Ces derniers ont pour habitude de lutter contre les pratiques de prix des entreprises en position dominante, estimant que les rabais de fidélité peuvent fausser la concurrence. Ils craignent notamment que de telles pratiques incitent les clients à s’engager de manière exclusive avec les entreprises dominantes, empêchant ainsi une concurrence saine et l’innovation sur le marché.
Cette affaire soulève des questions plus larges concernant la capacité des régulateurs à prouver que certaines pratiques commerciales, notamment dans le secteur des technologies, sont anti-compétitives. Intel, pour sa part, a toujours contesté les accusations, affirmant que ses rabais étaient légitimes et bénéficiaient aux consommateurs en abaissant les prix des processeurs. Le groupe a également soutenu que ses actions n’avaient pas empêché la concurrence d’innover et de croître, citant les progrès réalisés par ses concurrents comme preuve que le marché était resté compétitif malgré ses pratiques commerciales.
Cette décision pourrait influencer la manière dont la Commission européenne aborde les futures enquêtes sur les abus de position dominante, en particulier dans le secteur des technologies, où la concurrence est souvent féroce et où les géants de l’industrie bénéficient de larges parts de marché.