Youssef Gastli est un petit prodige de la cuisine. A seulement 31 ans, ce jeune chef formé à l’Institut Paul Bocuse à Lyon et passé par les cuisines du Meurice et du Sensing (Guy Martin), vient d’ouvrir son premier restaurant : Plume.
L’établissement, au design épuré mais chaleureux, ne propose que 23 places assises pour offrir à ses clients un service impeccable et des assiettes empreintes de naturalité.
Un mois et demi après l’ouverture de Plume, Youssef Gastli, lunettes rondes vissées sur le nez et tablier noué autour de la taille, nous ouvre les portes de ce petit bijou qui fait déjà beaucoup parler de lui.
Vous avez ouvert votre premier restaurant fin janvier et Plume est dejà sur toutes les lèvres. Est-ce une surprise pour vous ? Comment expliquez-vous un tel engouement ?
Je ne m’attendais pas du tout à ce que les choses se fassent aussi vite. Cela fait à peine un mois et demi que nous sommes ouvert, et je suis étonné de l’ampleur que cela a pris. Au début je ne comptais pas faire trop de communication sur le restaurant puis on a finalement monté tout un dossier de presse et des journalistes des Pieds dans le Plat, du Fooding et du Figaroscope sont venus. Mais au final, ces personnes ont été ravies par le résultat dans l’assiette, ce qui a créé un effet domino.
Votre cuisine a-t-elle des traits distinctifs ?
Ça serait prétentieux de dire que ce que je fais est radicalement différent du travail des autres, mais j’essaye de faire au mieux au jour le jour et de « vendre du bonheur » comme j’aime le dire. J’ai une équipe jeune, motivée et dynamique et c’est ce qui selon moi fait l’identité de Plume. Comme dans tous les restaurants chaque personne a son importance. On est aussi tributaires des fournisseurs, c’est un engrenage.
Justement, comment choisissez-vous vos matières premières ?
Je marche beaucoup au feeling comme pour la création de mes plats. Certains confrères passent beaucoup de temps sur un plat pour structurer les choses alors que moi, c’est un peu plus chaotique. Ça bouillonne dans ma tête ! Parfois je me réveille à 4h du matin avec une idée en tête et j’essaye de la reproduire. Il m’arrive aussi de regarder une affiche dans le métro qui me fait penser à une idée de plat. Je compose avec tout ça et j’essaye de trouver les produits dont j’ai besoin ou de faire avec ce que me propose la nature aussi, parce que c’est un peu l’esprit de la maison. On travaille avec le fournisseur Terroirs d’Avenir et chaque matin il m’envoie un mail avec les produits en stock et ça change tous les jours. Du coup notre carte varie plusieurs fois par semaine.
Vous êtes né à Tunis où vous avez vécu jusqu’à l’âge de 20 ans. La Tunisie est-elle présente quand il s’agit d’imaginer un plat ?
Non pas vraiment. De temps en temps il y a une petite étincelle qui vient, une piqûre de rappel. Mais j’ai appris la cuisine en France et je respecte beaucoup le terroir. Je ne travaille qu’avec des produits locaux : nos légumes viennent d’Île-de-France, nos viandes et poissons du Pays basque et de Vendée.
Qu’avez-vous retenu de vos expériences au Meurice, chez Senderens et au Sensing (Guy Martin) ?
Ces expériences sont arrivées à un niveau différent de ma carrière donc je ne les ai pas appréhendées de la même manière. Quand je suis arrivé en stage au Meurice, c’était la première fois que je mettais les pieds dans une cuisine professionnelle. C’était un restaurant 2 étoiles et j’étais un peu perdu. C’est là bas que j’ai appris à marcher on va dire. La confirmation s’est faite au Senderens et ensuite au Sensing, j’avais déjà quitté l’école, j’étais dans le milieu professionnel et j’avais déjà plus confiance en moi. Mais on a la chance d’avoir un métier où on apprend toute notre vie. On peut même régresser parfois ! C’est comme la carrière d’un sportif avec des hauts et des bas, des coups de blues, on peut tomber dans une brigade où ça se passe mal…
Ça vous est déjà arrivé ?
Oui et j’ai même pensé arrêter la cuisine ! Mais j’ai vite repris du poil de la bête.
Y’a-t-il quelqu’un ou quelque chose qui vous intrigue particulierment dans le monde de la gastronomie moderne ?
Ce n’est pas vraiment nouveau mais les chefs qui font leur propre potager c’est très intéressant. Si j’avais un grand jardin je ferais pousser mes légumes. Je pense que c’est le rêve de tous mes confrères. Mais tout ce qui est cuisine moléculaire ou un peu chimique ça n’est vraiment pas ma tasse de thé. Je suis dans une cuisine naturelle, d’instinct. Je n’épluche pas mes légumes, on trouve une sauce différente avec chaque plat, je n’aime pas dénaturer le produit car c’est là qu’on en tire le meilleur.
Vous n’épluchez pas vos légumes ?
Non. Beaucoup de gens mangent les pommes de terre avec la peau par exemple. Et bien moi je n’épluche pas mes carottes. Déjà pour conserver plus de nutriments mais aussi pour donner plus de goût au plat. Sinon on peut faire des bouillon avec les épluchures. Ça évite le gaspillage !
Quels sont vos futurs projets ?
Pour l’instant je n’en ai pas car j’ai beaucoup à faire avec le restaurant. Mon projet actuel est de faire en sorte que ça marche ici et après on verra.
Où ? : Plume, 24 rue Pierre Leroux, 7e arrondissement.
Source : finedininglovers.fr
Crédits photos : Félix Vigne et Pierre Lucet-Penato