Face au durcissement des normes d’émission de CO2, la pratique du « pooling » entre constructeurs automobiles suscite des inquiétudes quant à son impact sur la compétitivité de l’industrie européenne. Renault Group a ainsi souligné mercredi l’urgence d’une clarification de la part de Bruxelles concernant ces réglementations.
Des accords de « pooling » pour éviter les amendes, mais à quel prix ?
Un document officiel de l’Union européenne, révélé mardi, a mis en lumière une tendance croissante : plusieurs constructeurs envisagent de recourir à l’achat de crédits carbone auprès de spécialistes des véhicules électriques (VE) tels que l’américain Tesla ou Polestar, marque détenue par le géant chinois Geely. Cette stratégie vise à éviter de lourdes amendes liées au non-respect des objectifs d’émissions de CO2.
Parmi les acteurs concernés, des alliances se dessinent : Stellantis, Toyota, Ford, Mazda et Subaru envisageraient de conclure des accords de « pooling » avec Tesla. Parallèlement, un autre regroupement se formerait autour de Mercedes, incluant Polestar, Volvo Cars et Smart.
Renault dénonce une stratégie contre-productive
Cette pratique du « pooling », bien qu’autorisée, soulève des questions quant à son efficacité à long terme pour l’industrie européenne. Une porte-parole de Renault Group a exprimé les préoccupations du constructeur français : « Sans une position claire de la part de la Commission européenne, les constructeurs sont amenés à prendre des décisions contre-productives comme l’achat de crédits à des concurrents, de possibles réductions de production, etc… Cela conduit à affaiblir l’industrie européenne ».
Face à cette situation, Renault appelle à une action rapide de la part des autorités européennes : « En ce début d’année, le groupe demande à nouveau et de toute urgence à la Commission européenne de la visibilité ».
Le mécanisme du « pooling » en détail
Le « pooling » permet aux entreprises vendant moins de véhicules électriques de mutualiser leurs émissions avec des acteurs spécialisés dans ce domaine, considérés comme plus « vertueux » en termes de CO2. En achetant des crédits d’émissions à ces derniers, les constructeurs traditionnels peuvent abaisser leur moyenne d’émissions globale et ainsi éviter des pénalités financières pouvant atteindre plusieurs centaines de millions d’euros.
La situation spécifique de Renault
Selon les analystes, Renault se trouve dans une position relativement moins vulnérable face à ces réglementations. La masse moyenne de ses véhicules étant inférieure à celle de nombreux concurrents, le constructeur français pourrait atteindre ses objectifs avec un mix électrique d’un peu moins de 20%, contre au moins 22% pour la moyenne européenne.
De plus, Renault pourra compter en 2025 sur ses ventes solides de véhicules hybrides et sur le lancement de sa nouvelle R5 électrique, malgré un marché européen de l’électrique qui peine à décoller.
Renault reste mobilisé, mais prudent
Le groupe au losange a réaffirmé mercredi son engagement à « répondre aux exigences » de la réglementation sur le CO2, tout en précisant qu’il était « prématuré de dire à ce stade » s’il aurait recours à des accords de « pooling ». Cette déclaration souligne la complexité de la situation et l’attente d’une clarification de la part de la Commission européenne pour permettre aux constructeurs de prendre des décisions stratégiques éclairées.