La Fondation BIAT décortique l’écosystème entrepreneurial tunisien

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Afin d’aider son équipe à développer la stratégie de l’axe Entrepreneuriat et de définir son positionnement dans l’écosystème entrepreneurial tunisien, la Fondation BIAT a commissionné le cabinet de conseil en  pour élaborer une étude sur l’écosystème entrepreneurial tunisien allant du contexte macroéconomique du pays jusqu’aux benchmarks internationaux.

Les résultats de cette étude, basée – outre les statistiques officielles – sur plus de 30 entretiens avec des acteurs de l’écosystème entrepreneurial tunisien et international, ont été présentés récemment par le cabinet Roland Berger, à l’occasion du premier Cercle de l’Entrepreneuriat de la Fondation BIAT. À la lumière de ces résultats, la fondation a élaboré sa stratégie qui sera présentée prochainement.

La situation de l’emploi en Tunisie
Dans un contexte macro-économique marqué par une stagnation de la croissance économique et la persistance d’un taux de chômage important (touchant principalement les jeunes), seuls 1,6 million de personnes sur une population de 11 millions d’habitants travaillent dans le secteur privé formel tandis que 52% de la population active occupée travaillent dans le secteur des services.

L’étude révèle par ailleurs que les entreprises en Tunisie sont très majoritairement unipersonnelles (moins de 13% des entreprises ont plus de 5 salariés) et que 49,9% des employés ne bénéficient d’aucun système de sécurité sociale.

Alors que l’une des principales explications du chômage massif des diplômés est l’inadéquation de la formation avec les besoins des entreprises, l’entrepreneuriat peut contribuer à répondre au chômage des jeunes et à dynamiser l’économie tunisienne à travers l’incitation au recours à la formation dans le cadre d’une création d’entreprise, estime le cabinet Roland Berger.

Ainsi, outre la potentielle réorientation de l’économie tunisienne vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée (services, technologie, intégration de filières) et une baisse directe du chômage à travers les créations d’emploi, l’entrepreneuriat peut rééquilibrer les inégalités de développement régionales en facilitant la création d’entreprises dans les régions défavorisées.

L’écosystème entrepreneurial tunisien
D’après l’étude, l’entrepreneuriat est relativement peu répandue en Tunisie par rapport aux pays étant dans une phase de développement comparable. Ainsi, la comparaison internationale du taux d’entrepreneuriat fait ressortir que la Tunisie détient le taux d’entrepreneuriat le plus bas du groupe « efficiency driven » après la Russie.

A cet égard, la création d’entreprises en Tunisie est principalement tirée par le secteur des services, en particulier le commerce et le transport / entreposage. Ces entreprises créées sont le plus souvent des micro-entreprises de moins de 5 salariés.

L’étude a, par ailleurs, fait savoir que les entrepreneurs tunisiens sont le plus souvent des hommes entre 25 et 44 ans avec un taux de survie inférieur pour les entreprises créées par des femmes. Par ailleurs, parmi les entreprises créées en l’an 2000, moins de 50% étaient encore en activité en 2013 (Plus forte vulnérabilité des micro-entreprises dans le secteur du commerce).

L’étude relève également que les déclarations de cessation ne sont pas faites pendant la même année de la cessation (25% des cas de cessation sont déclarés après plus de 2 années).

Les six obstacles majeurs qui se dressent sur la route des entrepreneurs

Les auteurs de l’étude du cabinet Roland Berger ont identifié cinq obstacles majeurs qui se dressent sur la route des entrepreneurs tunisiens. Il s’agit de :

  1. Culture entrepreneuriale : Manque d’esprit d’entreprise, de créativité, de maturité des projets : faut-il davantage travailler la phase amont et donner envie aux Tunisiens de se lancer, pour alimenter le « pipe » de projets solides ?
  2. Lourdeurs administratives : Délais, incertitudes, complexité : les règlementations et politiques publiques vont elles dans le sens du soutien à l’entrepreneuriat, ou au contraire se posent-elles en obstacle à la réussite des projets ?
  3. Accès au financement : Il existe certains besoins en financement non-couverts car ayant un degré de risque trop important : le very early stage et les tickets d’investissement moyens.
  4. Initiatives de soutien : Manque de moyens, durée réduite, lenteur : comment renforcer les initiatives existantes ou en créer de plus performantes pour s’assurer que les projets prometteurs trouvent l’appui dont ils ont besoin ?
  5. Manque de compétences et de formation : La formation des Tunisiens est-elle adaptée aux besoins du marché ? Les formateurs et les coachs sont-ils les mieux armés pour susciter des vocations et accompagner les entrepreneurs ?
  6. Manque de coordination : De nombreuses initiatives coexistent et l’enjeu est de coordonner toutes ces initiatives et de les faire connaitre auprès de la cible.

In fine, l’étude constate que les évolutions de l’écosystème sont très récentes en Tunisie et que les efforts accomplis depuis 2011 n’ont pas encore complètement porté leurs fruits.

D’un autre côté, l’état d’esprit de l’Etat doit changer. « Aujourd’hui, on part du principe que l’entrepreneur est un voleur jusqu’à preuve du contraire, ce qui explique le nombre de papiers et de garanties à fournir. Le coût du temps passé sur les démarches administratives est trop important par rapport à l’aide reçue », explique l’étude qui affirme que les lourdeurs administratives sont la première source de difficultés pour les entrepreneurs en Tunisie.

Au niveau des démarches administratives, le cabinet constate que les délais d’obtention de papiers officiels sont trop longs et pénalisent les entrepreneurs, qui ne peuvent pas se permettre d’attendre, en particulier quand il s’agit d’innovation.

S’agissant du financement via des banques publiques, les délais d’obtention d’un crédit bancaire auprès de la BFPME peut prendre 18 mois voire plus sachant que les dossiers ne prennent pas en compte le besoin en fonds de roulement de l’entreprise et que les crédits nécessitent des garanties que la plupart des entrepreneurs ne sont pas en mesure de fournir.

Quant aux marchés internationaux, les délais de blocage aux Douanes pour importer des biens sont très variables et peuvent être réellement pénalisants. En outre, la non-convertibilité du dinar et l’interdiction de posséder un compte à l’étranger sont de réels problèmes pour les entrepreneurs qui visent les marchés étrangers.

Problème d’accès au financement en Tunisie
Toujours selon le cabinet Roland Berger, l’accès au financement reste le point d’achoppement principal pointé par les experts. L’étude souligne que la Tunisie est en retard par rapport à ses voisins en matière d’accès aux financements pour les PME puisque 24% des échecs d’entreprises sont liés à la difficulté à trouver des financements.

Le cabinet souligne aussi que les projets de taille moyenne sont assez mal traités car ils sont trop petits pour être des projets industriels rentables et ont un besoin d’accompagnement plus approfondi. De même, le « very early stage » est peu couvert car il s’agit d’une phase très risquée et personne ne s’engage sur le risque : ni l’entrepreneur, ni l’organisme de soutien. « C’est un des points bloquants pour l’alimentation du « pipe » de projets », affirme le cabinet.

Principales faiblesses des initiatives de soutien à l’entrepreneuriat en Tunisie
Les modalités de soutien à l’entrepreneuriat ne sont pas toujours adaptées et leur ampleur reste souvent limitée. La grande majorité des initiatives de soutien à l’entrepreneuriat a été créée depuis moins de 5 ans, et les fonds alloués sont voués à disparaitre à moyen terme.

L’étude souligne ainsi que Le territoire tunisien est inégalement desservi en termes d’appui à l’entrepreneuriat : les initiatives publiques sont quasiment les seules à agir dans les régions de l’intérieur et leur efficacité est parfois contestée. Le foisonnement et le chevauchement des offres de soutien rend le parcours des entrepreneurs complexe et confus, explique le cabinet qui indique toutefois que l’efficacité, la cohérence et la notoriété des initiatives de soutien à l’entrepreneuriat peuvent être améliorées.

Benchmarks internationaux
Parmi les pays sélectionnés par le cabinet et qui sont parvenus à créer un écosystème entrepreneurial durable et efficace, la Jordanie qui a commencé depuis 2004 à créer une dynamique entrepreneuriale avec le « Queen Rania Center for Entrepreneurship ». Résultats : +5.000 participants au concours QRNEC, 35 startups ont été lancées par des participants au concours, +300 emplois créés par ces startups.

En 3 ans, Amman a intégré le Top 10 mondial des villes les plus dynamiques pour lancer son entreprise technologique

En Turquie, dès les années 1990, le gouvernement turc a commencé à créer un écosystème fertile dans le secteur des Technologies

Au Brésil, en 1972, le Gouvernement mandate la Banque de Développement pour créer le programme de soutien aux entrepreneurs SEBRAE

Le Chili a insufflé l’esprit d’entreprise auprès de sa population en faisant venir des entrepreneurs du monde entier au Chili

Par ailleurs, plusieurs benchmarks internationaux témoignent du soutien du secteur privé à l’entreprenariat. A titre d’exemple, la BMCE Bank (Maroc) a lancé cette année son concours de création d’entreprise à destination de tous les jeunes du continent africain afin de faire émerger les idées qui vont transformer l’Afrique.

Télécharger l’étude stratégique de l’Écosystème Entrepreneurial tunisien

Source : IlBoursa

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