En 2020, il a manqué au moins 59 milliards de dollars sur l’ensemble du continent pour financer les infrastructures, notamment dans l’eau. La Chine confirme, notamment, son net recul en matière d’engagements de capitaux.
Pont d’Abidjan, port en eau profonde de Dakar-Ndayane, métro du Caire, autoroute urbaine de Nairobi… les projets d’infrastructures en Afrique semblent bouillonner, pourtant le continent souffre toujours d’un déficit en matière de financement. Telle est la principale conclusion du Rapport annuel du Consortium pour les infrastructures en Afrique (ICA), publié mi-décembre 2022 et qui porte sur l’année 2020.
Loin du record historique de 100 milliards de dollars atteint en 2018, les financements attribués aux infrastructures ont atteint 81 milliards de dollars en 2020.
Le recul des engagements constaté en 2020 (4 milliards de dollars de moins qu’en 2019), s’explique notamment par les disruptions liées à la pandémie de Covid-19 , selon ce rapport de référence de l’ICA qui couvre les domaines des transports, de l’eau et de l’assainissement, de l’énergie et des technologies de l’information et de la communication (TIC).
Créé, pour rappel, lors du sommet de Gleneagles du G8 en 2005, l’ICA rassemble, autour de la Banque africaine de développement, de très nombreux partenaires, notamment les pays du G7, l’Union européenne, les banques de développement actives sur le continent (Banque mondiale, Afreximbank, BEI, BERD, BIsD, BOAD, etc…) ainsi que certains acteurs privés, dont Vinci.
Comme à l’accoutumée, l’ICA tente de chiffrer dans son rapport annuel le déficit de financement existant entre les besoins des économies africaines en infrastructure et les capitaux engagés par les Etats, le secteur privé ou les banques de développement.
Dans cette édition, l’organisme multilatéral estime que ce déficit était compris entre 59 et 96 milliards de dollars en 2020 contre une fourchette de 53 à 93 milliards de dollars, en 2019. Bref, le « gap » s’est accru « dans tous les secteurs à l’exception des TIC », pointe le rapport qui estime « la baisse des engagements creuse l’écart entre les investissements annuels nécessaires pour fournir des services d’infrastructure de base aux populations africaines et les montants de financement réels engagés ».
A ce titre, le plus fort déficit est constaté dans le secteur de l’eau (plus de 49 milliards de dollars). « L’une des principales caractéristiques des secteurs de l’électricité et de l’eau et de l’assainissement (…) est leur manque de viabilité financière, en ce sens que leurs revenus ne couvrent pas le coût total des opérations, y compris celui des investissements. Les tarifs moyens sont trop bas, la facturation et le recouvrement sont insuffisants et l’efficacité opérationnelle des services d’électricité et d’eau est inadéquate », analyse le rapport.
Au plan sectoriel, le secteur de l’eau n’a capté ainsi que 10% des financements en 2020 alors que celui des transports (y compris la logistique portuaire) se taille la part du lion (42%), suivi de l’énergie (29%).
En matière de répartition des sources de financement, la part des gouvernements africains demeure la plus élevée, comme les dernières années. Les Etats du continent ont fourni 41% du total des engagements financiers (soit 33,406 milliards de dollars) vers les infrastructures.
Un des faits marquant du rapport, pour cette édition, est la place prise par le secteur privé (banques commerciales, fonds, opérateurs de projet…) qui a dégagé 19 milliards de dollars de financement, un niveau record.
A l’inverse, la part des engagements des membres de l’ICA (pays occidentaux, banques de développement…) baisse nettement passant de 31,6% à 22,4% du total entre 2019 et 2020.
On notera aussi la confirmation du très fort recul des engagements de la Chine, tendance initiée avant même la Covid-19. Les financements issus de l’ex-Empire du Milieu qui s’élevaient encore à 25,6 milliards de dollars en 2018 ont plongé à 6,7 milliards de dollars en 2019, puis 6,4 milliards de dollars sur 2020.
« Ces montants sont (…) conformes à l’intention déclarée du gouvernement chinois de réduire les investissements en Afrique, en particulier dans les infrastructures, au vu des problèmes d’endettement de plusieurs pays africains », estime le rapport.
L’Inde pour sa part ne cesse de progresser ces dernières années, et affiche 1,3 milliard de dollars de financement en 2020, soit le deuxième rang des pays non-africains,
Les financements de la France ont aussi fortement chuté en 2020 à 966 millions de dollars contre 1,93 milliard, chaque fois en 2018 et 2019.
Hormis les Etats eux même, le groupe de la Banque mondiale (incluant la SFI) apparaît comme le principal bailleur du continent pour les infrastructures en 2020 (7,17 milliards de dollars) suivi de la Banque africaine de développement (2,08 milliards de dollars).
A noter qu’en terme régional, c’est l’Afrique de l’Ouest qui a capté la plus grosse part des financements, soit 27% du total (un niveau stable) suivie de l’Afrique du Nord (21%).
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