Les Bourses européennes ont terminé en nette baisse jeudi et Wall Street évoluait également dans le rouge à mi-séance en réaction à l’accélération du resserrement monétaire des banques centrales, Réserve fédérale américaine et Banque nationale suisse en tête, ce qui a fait bondir les rendements obligataires et mis sous pression les actions, les investisseurs redoutant de plus en plus un plongeon de l’économie en récession.
À Paris, le CAC 40 a fini en repli de 2,39% à 5.886,24 points, entrant en zone de « bear market » (marché baissier), l’indice accusant une contraction de plus de 20% par rapport à son record de clôture du 5 janvier à 7.376,37 points. Le Footsie britannique, pour sa part, a cédé 3,08% et le Dax allemand 3,31%.
L’indice EuroStoxx 50 a reflué de 2,74%, le FTSEurofirst 300 de 2,2% et le Stoxx 600 de 2,31%.
Après la hausse mercredi soir de 75 points de base des taux de la Réserve fédérale américaine (Fed), la Banque nationale suisse (BNS) a surpris jeudi en relevant son taux directeur pour la première fois en 15 ans, de 50 points de base.
Les deux banques centrales ont en outre clairement indiqué que d’autres hausses pourraient intervenir dans les prochains mois pour juguler une inflation s’étant établie à un niveau record.
Si la BNS a maintenu sa prévision de croissance de l’économie suisse pour cette année, à environ 2,5%, la Fed a elle dit anticiper dans les prochains mois un ralentissement économique et une hausse du chômage aux Etats-Unis.
La Banque d’Angleterre (BoE), pour sa part, a annoncé jeudi un relèvement d’un quart de point de son taux directeur, sa cinquième hausse depuis décembre dernier, en assurant qu’elle agirait « avec force » si nécessaire face aux risques liés à l’inflation.
En zone euro, les marchés monétaires prévoient désormais une hausse de 190 points de base des taux de la Banque centrale européenne (BCE) d’ici décembre, contre une prévision de 140 points mercredi.
Les derniers tours de vis des banques centrales ont alimenté la nervosité et la volatilité sur les marchés, l’indice CBOE aux Etats-Unis évoluant nettement au-dessus des 30 points, tout comme son équivalent européen, qui a fini sur un gain de 8% à 32,5 points.
« La Fed dépeint désormais un scénario central qui se rapproche beaucoup plus d’un atterrissage brutal », a souligné dans une note Jim Reid, stratège chez Deutsche Bank.
Les analystes de Wells Fargo, de leur côté, ont estimé que la probabilité d’une récession aux Etats-Unis était désormais supérieure à 50%.
VALEURS EN EUROPE
En Europe, tous les principaux secteurs ont fini dans le rouge, la distribution accusant l’une des plus fortes contraction dans le sillage de l’avertissement d’ASOS. Le groupe de mode en ligne britannique, qui a plongé de 32,4%, a fait état d’une augmentation significative des retours d’articles de ses clients dans un contexte de fortes pressions inflationnistes..
Ses concurrents Zalando et Boohoo ont chuté respectivement de 12,4% et 11,2%.
Les compartiments des ressources de base (-3%) et de l’énergie (-3,4%) ont également souffert sur fond de craintes sur l’approvisionnement, Engie (-7,2%) ayant déclaré mercredi avoir constaté une baisse des livraisons de gaz après les nouvelles restrictions sur les exportations décidées par la Russie.
TotalEnergies a abandonné 2,9%, le groupe allemand Uniper 9,7% et l’autrichien OMV 6,2%.
Le secteur des nouvelles technologies (-4,4%), sensible à l’évolution des taux, a accusé la plus forte baisse du Stoxx 600 avec Capgemini en repli de 2,01%, SAP en recul de 1,3% et ASML en chute de 6,4%.
Côté hausse, Euronext a pris 1,5%, à la faveur du relèvement de recommandation de JPMorgan sur la valeur à « surpondérer ».
A WALL STREET
Au moment de la clôture en Europe, le Dow Jones reculait de 2,3%, passant pour la première fois depuis janvier 2021 sous les 30.000 points. Le Standard & Poor’s 500, tombé en « bear market », cédait 3% et le Nasdaq de 3,6%, les deux indices se dirigeant vers leur dixième baisse hebdomadaire en 11 semaines.
Tous les principaux secteurs du S&P-500 étaient dans le rouge, l’énergie (-4,4%) et la consommation (-4,1%) affichant parmi les plus importants replis.
Les valeurs de croissance étaient également délaissées: Apple perdant 3,5%, Microsoft 2,6% et Nvidia 5,2%, tandis que l’indice sectoriel des nouvelles technologies abandonnait 3,8%.
Tesla refluait de 6,4% après l’annonce par le groupe d’une nouvelle augmentation du prix de ses voitures en raison de l’inflation.
LES INDICATEURS DU JOUR
Les inscriptions au chômage aux Etats-Unis ont baissé moins que prévu la semaine dernière, à 229.000, tandis que les conditions d’activité dans la région de Philadelphie se sont de nouveau dégradées en juin, avec un indice « Philly Fed » en repli à -3,3.
TAUX
Le relèvement inattendu des taux de la Banque nationale suisse a soutenu les rendements obligataires en Europe, certains analystes estimant que la BCE va désormais se montrer encore plus agressive dans sa politique monétaire.
Le taux du Bund allemand à dix ans a fini sur un gain de cinq points de base, à 1,693%, après avoir atteint en séance 1,812%, un plus haut depuis 2014, et celui à deux ans, le plus sensible à l’évolution des taux, s’est envolé de huit points à 1,132% après avoir touché en séance 1,261%, un pic depuis 2011.
Le rendement de l’OAT française à dix ans a pris quatre points à 2,258%, tandis que son équivalent italien de même échéance est remonté au-dessus de 4% en séance avant de fléchir en clôture à 3,853%.
En Grande-Bretagne, le rendement du Gilt à deux ans a gagné en séance 31,5 points de base à 2,274%, sa plus forte hausse depuis la crise financière de 2008-2009, en réaction à l’annonce de la Banque d’Angleterre qui s’est dite prête à agir « avec force » face à l’inflation. Le dix ans a fini sur un gain de 3,8 points à 2,506% après avoir touché un pic depuis juillet 2014 à 2,745%.
Aux Etats-Unis, le rendement des Treasuries à dix ans, qui est monté en séance à 3,438%, et celui à deux ans à 3,355% reculaient respectivement de 7,5 points et 10,6 points à la clôture des Bourses en Europe.
CHANGES
Le franc suisse, porté par les annonces de la BNS, a touché un sommet de deux mois face à l’euro à 1,0200 (+1,8%) et de près d’un mois contre le dollar à 0,9807 (+1,4%).
L’euro remonte de 0,61% à 1,0506 dollar.
L’indice mesurant les fluctuations du billet vert face à un panier de devises de référence, qui avait atteint un sommet de 20 ans mercredi avant les annonces de la Fed, recule jeudi de 0,96%, la hausse de 75 points de base des taux aux Etats-Unis ne constituant pas une surprise.
PÉTROLE
Les cours pétroliers, tombés en séance à un creux de deux semaines, sont volatils, les investisseurs étant partagés entre les craintes d’une récession dans le sillage de la forte hausse des taux d’intérêt et les tensions sur l’offre.
Le Brent grignote 0,09% à 118,64 dollars le baril le baril et le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) 0,52% à 116,02 dollars le baril au moment de la clôture des Bourses européennes.