BAD : L’explosion démographique en Afrique est une bombe à retardement
La Banque africaine de développement et ses gouverneurs pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique du Nord ont souligné à Abidjan, en Côte d’Ivoire, la nécessité de prendre des mesures urgentes pour faire face à la croissance démographique et au chômage des jeunes.
A l’issue d’une rencontre de deux jours, ils ont toutefois reconnu que la forte progression de la population du continent, notamment sa jeunesse, est un moteur de croissance potentielle pour le monde.
« La bonne nouvelle est que la solution est à notre portée et nécessitera des investissements », a déclaré Akinwumi Adesina, président de la Banque africaine de développement qui a, notamment, échangé avec les gouverneurs sur la meilleure stratégie pour combler le déficit d’investissement dans les infrastructures en Afrique estimé à près de de 170 milliards de dollars.
Pour combler le déficit d’investissement, assurer la croissance inclusive et créer des emplois pour la population du continent, la réunion a approuvé le principe d’organiser le African Investment Forum sous l’égide de la Banque africaine de développement et l’a décrit comme une formidable opportunité de mobiliser des investissements à fort impact.
Le ministre tanzanien des Finances et de la planification, Isdor Mpango, a plaidé pour une implication plus étroite du secteur privé dans le financement du développement sur le continent.
« La Banque africaine de développement est bien placée pour conseiller, aider les gouvernements et le secteur privé à proposer des projets bancables », a déclaré M. Mpango, appelant à l’accès à des ressources directes pour fournir un soutien budgétaire et des opportunités d’investissement.
L’African Investment Forum, prévu du 7 au 9 novembre 2018 à Johannesburg, en Afrique du Sud, permettra à la Banque et ses partenaires de présenter des projets bancables, d’attirer des financements et de fournir des plateformes pour investir en Afrique.
« Une des spécificités du Africa Investment Forum est qu’il n’y aura pas de discours, les seuls discours seront des transactions », s’est félicité le président Adesina.
Claver Gatete, ministre des Finances et de la planification économique du Rwanda, a déclaré : « La Banque africaine de développement a déjà discuté avec nous du concept du Africa Investment Forum et le gouvernement rwandais prend très au sérieux ce forum. »
« Les emplois viendront de l’industrialisation : la nouvelle approche consistant à utiliser le Forum africain de l’investissement pour réduire les risques et attirer les investisseurs est la voie à suivre », a estimé Kiplagat Rotich, ministre kenyan des Finances.
On estime que 13 % de la population mondiale vit aujourd’hui en Afrique subsaharienne. Ce chiffre devrait plus que doubler d’ici à 2050. Selon la division de la population de l’ONU, quatre milliards (ou 36 % de la population mondiale) pourraient vivre dans la région d’ici à 2100. L’Afrique devrait avoir plus de 840 millions de jeunes d’ici 2050, le continent ayant la population la plus jeune sur Terre.
Selon Adesina, « il nous reste 12 ans pour réaliser les Objectifs de développement durable, et si l’Afrique n’atteint pas les Objectifs de développement durable, le monde ne les atteindra pas non plus. La Banque africaine de développement accélère le développement de l’Afrique à travers ses High 5. Nous approfondissons nos réformes, nous avons porté nos décaissements à leur plus haut niveau l’année dernière et nous mobilisons davantage de ressources pour l’Afrique. »
Le ministre tunisien du développement, de l’investissement et de la Coopération internationale, Zied Ladhari, a rappelé que le transfert temporaire des activités de la Banque dans son pays pendant 11 ans a contribué à renforcer les liens. « Nous partageons la vision de la Banque : l’Afrique est le continent de l’avenir, c’est un grand moment pour l’Afrique avec la Banque au centre. L’exploitation du potentiel des économies africaines est une tâche que la Banque doit accomplir. »
Dans le cadre du programme High 5 de la Banque, 13 millions de femmes africaines ont bénéficié de nouvelles connexions électriques et 23 millions d’améliorations agricoles. En outre, 10 millions de femmes ont pu accéder à des projets d’investissement.
Une analyse de l’impact de la Banque africaine de développement de 2010 à 2017 indique que 27 millions d’Africains ont eu accès à de nouvelles connexions électriques. Quelque 899 000 petites entreprises ont bénéficié de services financiers. Plus de 35 millions de personnes ont bénéficié d’un meilleur accès à l’eau et à l’assainissement.
« Avec le soutien de la Banque, la Somalie est passée d’un État défaillant à un État fragile, a affirmé le ministre somalien des Finances, Abdirahman Beileh. La Banque africaine de développement a toujours été présente à nos côtés. Ensemble, nous pouvons atteindre la lumière qui brille au bout du tunnel. »
Le ministre algérien des Finances, Abderahmane Raouia, a déclaré : « Le plus grand défi pour l’Afrique aujourd’hui est la création d’emplois, un enjeu de stabilité et un levier pour tirer la croissance économique vers le haut. Nous devons offrir aux jeunes des opportunités d’emploi pour les convaincre de rester ici, sur le continent. »
Selon Simon Mizrahi, directeur du département de l’Assurance qualité et des résultats à la Banque africaine de développement, la Banque doit changer d’échelle. Ce ne sont plus des milliards qu’elle doit mobiliser mais des trillions de dollars pour faire de l’impact.
L’ambassadeur égyptien en Côte d’Ivoire, Mohamed El-Hamzawi, qui représentait le ministre des Finances, a rappelé les deux révolutions que son pays a connues en 2011 et 2014. Il a remercié la Banque pour son soutien à la stabilisation macroéconomique, aux réformes financières, aux infrastructures et aux projets énergétiques, entre autres.
Le ministre marocain de l’Économie et des finances, Mohammed Boussaid, a salué l’ambition de la Banque pour l’Afrique et a souligné son soutien aux projets dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture et des infrastructures. Il a déclaré : « Une augmentation de capital n’est pas un choix, c’est une nécessité. Aujourd’hui, le premier secteur d’exportation au Maroc n’appartient plus aux secteurs traditionnels tels que les phosphates, mais à l’industrie automobile. »
Grâce à une augmentation substantielle de capital, la Banque sera en mesure d’exécuter son solide pipeline d’opérations (15 milliards de dollars rien que pour 2018), y compris des projets d’infrastructure et d’intégration régionale. Les perspectives pour 2018-2020 sont brillantes, avec 50,3 millions de personnes qui devraient bénéficier d’un accès amélioré au transport contre 14 millions en 2017. En outre, plus de 35 millions de personnes devraient bénéficier de connexions électriques nouvelles ou améliorées, contre 4,4 millions en 2017.