Banque de l’Habitat : Des leviers de croissance en vue

  • Une banque à l’avant-garde de la restructuration des banques publiques.
  • Des avancées notables dans le programme de transformation: redressement des
  • fondamentaux et consolidation du positionnement concurrentiel.
  • Une courbe ascendante des résultats et un rapprochement des standards privés du secteur: la BH est la candidate la plus prédisposée à une privatisation.
  • Des leviers de rentabilité partiellement exploités: relance commerciale, assainissement de portefeuille et amélioration de l’efficacité opérationnelle.
  • Une marge d’amélioration au niveau de la qualité de portefeuille et de la structure des ressources.
  • Une valorisation encore attrayante.

1) Les dépôts

Sur les cinq dernières années et malgré un contexte d’assèchement de liquidité, la Banque de l’Habitat a continué ses efforts de collecte enregistrant une croissance supérieure à la concurrence (+8% pour la BH contre une progression moyenne de 6% pour le reste du secteur). Cette performance a été soutenue par l’extension du réseau d’agences (7 ouvertures moyennes par an). Avec une part de marché de 10%, à fin 2016, la banque étatique se classe en 5 ème position dans le palmarès de la collecte.

Compte tenu de sa vocation historique de « banque immobilière », la BH affichait, par le passé, une structure des ressources dominée par les dépôts d’épargne (une proportion moyenne de 37% sur la période 2010-2014). Il convient de rappeler, à ce titre, que le « PEL » était pendant longtemps le produit phare de la banque.

Outre l’importance des dépôts d’épargne, les ressources de la BH affichaient une autre spécificité historique: une forte proportion des dépôts à terme (une contribution moyenne de 37% sur l’intervalle 2010-2014) émanant, principalement, des entreprises publiques. Le positionnement sur l’habitat et le ciblage des entreprises publiques ont longtemps pénalisé le coût des ressources de la banque.

La donne a quelque peu changé depuis 2015. La BH a déployé des efforts notables pour diversifier sa collecte, privilégiant davantage les ressources les plus liquides, faiblement rémunérées. La part des dépôts à vue a dépassé le cap de 30% sur les deux dernières années. Cette orientation s’est accompagnée d’un ralentissement de la collecte au niveau des dépôts d’épargne et des dépôts à terme dont le poids respectif s’est établi à 33% et 36% sur les deux derniers exercices.

Malgré les efforts consentis, la BH continue à afficher un coût des ressources parmi les plus élevés du secteur (un coût apparent de 3,6%). Soulignons, par ailleurs, qu’avec une faible proportion des dépôts à vue (30% des ressources en 2016, contre une proportion moyenne de 40% pour la concurrence privée), la BH nous paraît moins bien positionnée pour profiter de la récente hausse des taux.

Banque Coût des ressources Taux de sortie Spread d’interêt
BIAT 2,3% 6,4% 4,1%
BT 3,5% 7,1% 3,5%
UBCI 3,1% 6,5% 3,5%
UIB 3,1% 6,6% 3,4%
Attijari Bank 3,0% 6,3% 3,4%
BNA 3,7% 7,1% 3,4%
BH 3,6% 6,6% 3,0%
ATB 3,4% 6,4% 3,0%
STB 3,6% 6,5% 3,0%
Amen Bank 4,4% 7,1% 2,6%
BTE 3,8% 6,4% 2,6%
WIB 6,0% 8,2% 2,1%
Secteur 3,6% 6,7% 3,1%


2) Les crédits

En dépit de la morosité ambiante, la BH a maintenu le cap en matière de crédits. Les engagements de la banque ont cru de 10% en moyenne, sur les cinq dernières années.
Un rythme de croissance plus rapide que la concurrence (+6% sur la période), qui s’est davantage accéléré après la recapitalisation (+15% en moyenne sur les deux dernières années).

La banque affiche une exposition historiquement importante au secteur immobilier. Une carence que la banque tente de réduire depuis quelques années. Avec une offre de crédits plus diversifiée, la BH est parvenue à ramener la part des financements immobiliers de 45% en 2012 à 35% en 2016.

Malgré le ralentissement immobilier, la BH a continué son soutien au secteur (progression des crédits immobiliers de 5% sur les cinq dernières années). Dans l’avenir, la BH compte conserver son leadership dans le financement de l’immobilier pour en faire un produit d’appel pour les particuliers.

3) Le Produit Net Bancaire
Sur le dernier quinquennat, la BH a réalisé une croissance annuelle moyenne de 11% de son PNB à 308MDt. Au vu du contexte sectoriel difficile, la marge d’intérêt a quasiment stagné (+2% à 149MDt) et la hausse du PNB a principalement émané des activités de portefeuille (+40% à 91MDt). A noter que le poids des revenus de placement a plus que doublé à 30% en l’espace de cinq ans (voir graphique ci-contre).

Avec une contribution encore faible dans le PNB (22% contre une moyenne de 26% pour la concurrence privée), les commissions représentent un relais de croissance potentiel pour la BH. La banque gagnerait à accroitre son PNB, en se focalisant davantage sur cette source de revenus.

4) La productivité
La productivité de la banque s’est nettement améliorée et ce, en dépit de l’élargissement du réseau d’agences (34 ouvertures sur la période 2012 – 2016). La maitrise des charges de personnel (une hausse de 6% sur le même intervalle) et la progression du PNB ont entrainé une amélioration de la productivité. Avec un coefficient d’exploitation de 46%, la BH demeure une véritable référence tant pour le secteur public que privé.

L’amélioration de la productivité devrait se poursuivre dans les années à venir. Le programme de restructuration des ressources humaines initié en 2016, générerait une économie de charges de 75MDt sur les deux prochains exercices. Ce faisant, la BH entend atteindre un coefficient d’exploitation cible de 41% d’ici 2018.

5) La qualité de portefeuille
À partir de 2013, la BH a enregistré un redressement remarquable de sa qualité de portefeuille. La politique de risque plus prudente et la progression des engagements ont valu à la banque une baisse graduelle de son taux des créances classées. Ce dernier s’est établi à 15% en 2016, surperformant, ainsi, la concurrence publique (une moyenne de 25% pour la STB et la BNA).

Parallèlement, la banque a accentué ses efforts de couverture. Avec une enveloppe annuelle moyenne de provisions sur les créances de 100MDt, sur les cinq dernières années, la BH a hissé son taux de couverture à 76%; un niveau qui la place dans les standards hauts du secteur. 6) La rentabilité

L’assainissement majeur du portefeuille opéré en 2013 a permis à la banque de renouer avec les bénéfices depuis 2014 et de retrouver de nouveaux paliers de rentabilité. La BH a bouclé l’année 2016 sur un résultat record de 98,6MDt (hors contribution conjoncturelle), soit un dépassement de 26% par rapport aux projections.

Au niveau consolidé, la société mère demeure le principal contributeur dans les bénéfices du groupe. Si quelques participations (principalement la Tunisian Foreign Bank) ont beau pénaliser la rentabilité consolidée, la contribution des filiales reste globalement positive (de l’ordre de 11MDt). Avec un résultat net part du groupe de 109,7MDt, la BH affiche un niveau de rentabilité qui se compare favorablement tant à ses paires publiques que privées (ROE de 21% contre une moyenne de 3% pour la concurrence publique et 18% pour le secteur privé).

Si la banque a franchi un nouveau cap en matière de rentabilité, ses ratios de solvabilité se sont dégradés (voir graphique ci-après). Atteignant aujourd’hui des seuils limites, les ratios Tier 1 (7,05%) et Tier 2 (10,03%), laissent envisager une recapitalisation possible si la banque souhaite poursuivre le même rythme de croissance.

Prévisions et perspectives d’avenir
Deux ans après le lancement de la restructuration, la situation de la BH rompt avec le passé. La banque a pu se refaire une place dans le secteur et atteindre un nouveau cap de rentabilité. Si la banque est à moitié « étatique », sa gestion s’apparente de plus en plus à une banque privée.

Les deux prochaines années s’annoncent, encore une fois, porteuses de changements pour la banque: poursuite de développement commercial, rationalisation de la collecte, implémentation d’un « Global Banking », poursuite du plan social…sont autant de chantiers auxquels la banque devrait s’attaquer pour intégrer le top 3 du secteur.

Côté chiffres, nous pensons que 2017 devrait s’inscrire sous le signe de la consolidation. Certes, la banque profiterait d’une amélioration de la productivité et de la hausse des taux, mais sa rentabilité serait grevée par la dotation au fonds de garantie des dépôts bancaires. Tenant compte d’une charge additionnelle de 12,7MDt, nous tablons sur une quasi-stagnation du résultat net à 98MDt pour la société mère et à 110MDt au niveau consolidé.

Comportement boursier et opinion de Tunisie Valeurs
Après l’annonce du projet de recapitalisation, le titre BH a connu un véritable rallye boursier, doublant quasiment de capitalisation, depuis 2015. Aux côtés des publications rassurantes, le parcours boursier du titre a été favorisé par un niveau de liquidité élevé. Depuis son transfert du fixing au continu (en 2016), la valeur a franchi un nouveau cap de liquidité. Avec un volume moyen quotidien de 0,3MDt sur les deux dernières années, la BH est la deuxième action la plus sollicitée de son secteur (après la BIAT).

Aujourd’hui et en dépit de l’importante progression du cours, la BH affiche des niveaux de valorisation encore attrayants, un P/E 2017e de 8,7x et un P/B 2016 de 1,6x, la plaçant aux côtés des banques « privées » les moins chères du secteur.

En plus du retour aux dividendes, le titre devrait profiter d’un flux d’annonces positives: 1) un aboutissement- probable- du rachat de la BHCI et 2) l’enclenchement du processus de privatisation. Nous recommandons le titre à l’achat.

 En MDt  2012 2013 2014 2015 2016 2017e 2018p
Créances sur la clientèle 4 292 4 179 4 766 5 342 6 273 6 900 8 035
Progression – 3% 14% 12% 17% 10% 16%
Dépôts clientèle 3 758 4 072 4 634 4 697 5 194 5 756 6 398
Progression 8% 14% 1% 11% 11% 11%
PNB 200 207 246 266 308 344 396
Progression 4% 19% 8% 15% 12% 15%
Dotations aux provisions 86 270 90 73 61 62 78
Frais généraux 105 109 121 125 141 159 180
Coefficient d’exploitation 53% 53% 49% 47% 46% 46% 45%
Résultat net* –       30,3 –     220,1 50,3 70,6 98,6 98,2 118,3
Progression 40% 40% 0% 21%
Résultat net part du groupe* –       35,2 –     211,7 55,3 82,5 109,7 109,8 130,5
Progression 49% 33% 0% 19%

Avec Tunisie Valeurs