BCT – Un éclairage utile sur le projet de partenariat public-privé
On sait que le recours en Tunisie à la pratique du Partenariat Public-Privé (PPP) en matière d’investissement, et de grands investissements publics en particulier, comme le propose le projet de Loi de finances 2018, fait débat. Toutefois, ce débat mérite d’être éclairé par les enseignements des expériences réalisées dans d’autres pays, le Royaume-Uni en l’occurrence, considéré, à juste titre, comme un pionnier en la matière. Une analyse à ce propos, due à Gerson Cohen, président des fonds d’infrastructures ‘Aberdeen Standard Investments’, et parue dans le quotidien britannique, le ‘Financial Times’ en date du 12 octobre 2017, sous le titre « Des voix populistes mettent à l’écart le rôle du capital privé dans l’amélioration des services publics » jette une lumière fort intéressante sur la controverse à propos du PPP.
Nous livrons dans ce qui suit une version en français de ladite analyse :
«La mobilisation du capital privé pour le développement des services publics vitaux est aujourd’hui un sujet d’actualité. En effet, des voix populistes s’élèvent pour affirmer que le régime de planification centralisé et le financement budgétaire demeurent préférables à la participation du capital privé en matière de promotion des services publics.
La montée des critiques contre la pratique du PPP, appelée encore ‘Initiative de Financement Privé’ (IFP), a fini par tarir les canaux de l’investissement privé en direction du secteur des services publics.
« Aberdeen Standard Investments », un des plus importants gestionnaires des capitaux des fonds de pension dans le monde, a lourdement investi dans les PPPs au Royaume-Uni, où il détient des participations dans plus de 60 projets PPP.
Certes, l’éclairage des avantages et des inconvénients des PPPs n’est pas toujours chose aisée. Toutefois, la tendance consistant à réduire la controverse à un débat binaire simpliste risque de détourner le capital privé disposé à financer des projets PPP, voire de nuire à l’image publique que les anti-PPP croient défendre.
Il faudrait bien rappeler, à cet effet, que des milliards de livres-sterling sont nécessaires à la construction et à la maintenance d’hôpitaux, de réseaux de transport, d’écoles et de traitement des eaux à travers le monde, dans un contexte marqué par des finances publiques, lourdement obérées par des charges d’endettement public explosives. Aussi est-il tout à la fois impératif et méritoire que des gouvernements financièrement en crise s’orientent vers la conclusion de partenariats publics-privés en vue de la réalisation d’équipements collectifs dans les meilleures conditions qui soient.
La réussite des PPP dépend aussi de certaines conditions, principalement de la transparence et du respect absolus des obligations contractuelles par les parties engagées, sachant par ailleurs que les capitaux privés disposés à s’investir dans les projets PPP sont constitués de fonds collectés par de petits épargnants et des retraités soucieux de sécurité et de rendement assuré.
Il est évident que le risque-zéro ne peut être garanti ni par les projets PPP, ni par aucune forme d’investissement. Des dépassements de couts ou une maintenance inadéquate peuvent toujours affecter ces projets. Toutefois, c’est toujours le secteur privé, et non les contribuables, le plus souvent tenus dans l’ignorance de pareilles dérives, qui en payent la facture.
Il reste que les avantages potentiels des PPPs sont réels et reconnus à l’échelle internationale. Au point que ce mode d’investissement mixte est devenu aujourd’hui une longue chronique de ‘success stories’ au Royaume-Uni.
Les professionnels et les entreprises britanniques ont contribué à établir des marchés en développement via les PPPs dans le monde entier. Les PPPs demeurent un instrument efficace pour les gouvernements. Ils permettent, en effet, de combattre les pratiques corrompues auxquelles sont exposés les marchés publics. Par ailleurs, il convient de rappeler que ce concept de PPP a été fortement soutenu par les G-20. Comme il convient de signaler que les pays riches en pétrole, bien que disposant de fonds d’investissement souverains puissants, à l’instar du Qatar ou d’Abu Dhabi, se sont également dotés de cadres régissant les PPPs.
Le cadre PPPs présente des avantages pour le capital privé. Mais il implique aussi des risques et des contraintes pour ce dernier: réaliser les projets dans les délais et dans le cadre des budgets prévus, et selon les spécifications de l’investissement arrêtées.
Au Royaume-Uni, les premiers projets PPP avaient connu des difficultés. Ils ont été, en effet, conçus, au départ, comme un mécanisme destiné à résoudre les problèmes engendrés par un contrôle fiscal inadéquat, au moment où les autorités britanniques étaient vulnérables, voire incapables de mener de grands projets.
Les PPPs ont apporté des avantages tangibles aux contribuables britanniques; ils sont parvenus, néanmoins, à protéger l’intérêt public sans affecter le cout du capital privé.
Pour mieux comprendre les problèmes d’infrastructure et comparer ce qui est comparable, l’évaluation de la pratique du PPP ne devrait pas s’ouvrir sur un débat idéologique par sociétés civiles ou réseaux sociaux interposés. Elle devrait, au contraire, viser à obtenir les meilleurs résultats possibles pour les contribuables et les utilisateurs publics, engageant ainsi les partenaires public et privé à regarder vers l’avenir ».
BCT