La Bourse contribue, certes, au financement de l’économie et plus particulièrement en cette période de crise sanitaire qui frappe le monde entier. Le marché boursier peut contribuer au financement à long terme et conforter les efforts du gouvernement et du secteur bancaire dans cette guerre sans répit engagée contre le covid-19 de manière à parer au plus pressé à la disette financière. Toutefois, l’incertitude plane toujours sur le marché financier. Peut-on s’attendre à un stress boursier ?
Bilel Sahnoun, DG de la Bourse de Tunis, a déclaré lors d’un webinaire organisé le 15 juin 2020, que le marché financier tunisien passe par une période très incertaine. Et de préciser encore : « Nous avons touché un creux au début de la pandémie de -14%. Les autres places financières partout dans le monde ont enregistré entre -25% et -35%.
Heureusement qu’on a été un peu épargné. La capitalisation boursière est détenue aujourd’hui à 25% par des investisseurs étrangers et là dedans, il y a 23% qui sont des investisseurs stratégiques sur de très longs termes. Nous avons dans ces investissements étrangers 2% qui ont un caractère volatil ».
La BCT et les banques ont jugé bon de reporter la distribution de leurs dividendes
Concernant la non distribution des dividendes pour les banques, le responsable a indiqué qu’il y a une volonté clairement souhaitée par la Banque Centrale de Tunisie (BCT) afin que les banques ne distribuent pas les dividendes alors que la collecte des dividendes fait que les courbes boursiers s’améliorent en conséquences. Et d’expliquer : « D’autant plus que derrière la collecte des dividendes, il y a un réinvestissement du marché financier. C’est une décision qui n’est pas sans conséquence.
Mais, en tenant compte des facteurs aléatoires et du risque que la pandémie peut engendrer surtout pour le secteur bancaire et sur les besoins futures des clients des banques, la BCT et les banques ont jugé bon de reporter la distribution de leurs dividendes à l’année prochaine probablement pour garder un niveau de fonds propre confortable et améliorer leurs capacités à distribuer des crédits en faveur de leurs clients ».
Les nouvelles conditions d’accès de la PME sur le marché alternatif seront publiées bientôt par le CMF
M.Sahnoun affirme par ailleurs que plusieurs chantiers sont en cours de finalisation dont la réforme du marché alternatif. « Ce marché a été créé en 2007 et il n’a pas connu de succès parce que les procédures d’admission étaient quasi identiques au marché principal. Le marché alternatif ne représente pas la même garantie de pérennité que le marché principal. Ce que nous avons fait, c’est d’alléger les conditions d’accès de la PME (au strict minimum) sur le marché alternatif. Mais de l’autre coté, nous avons interdit l’accès aux petits porteurs sur ces marchés. Le décret loi publié, en août dernier, a bien défini les investisseurs avertis et qui sont éligibles à entrer sur le marché alternatif. Il y a quelques textes d’application qui vont être diffusés très prochainement par le conseil du marché financier (CMF) sur cet allégement et sur les informations à minima à donner au marché avec un prospectus très allégé sur les introductions en bourse pour le marché alternatif. Cette nouvelle orientation permettra au marché financier d’être un acteur important dans le financement de la croissance et la relance de l’investissement ».
Le directeur de la Bourse a souligné que le passage par le marché alternatif des PMEs avec le capital investissement en tant qu’investisseur averti permettra aussi de préparer l’entreprise dans sa gouvernance et sa transparence et être prêt par la suite à intégrer le marché principal.
La moitié des secteurs qui composent notre PIB ne sont pas représentés en Bourse
« L’assurance et plus particulièrement l’assurance vie en Tunisie fait ses premiers pas. La base des assurés est déjà faible et le montant collecté n’est pas encore très important. Mais on constate toujours que l’assurance et l’assurance vie ne sont pas encore très proches du marché financier », ajoute-t-il.
En outre, le responsable relève que la moitié des secteurs qui composent notre PIB ne sont pas représentés en Bourse : « Nous n’avons pas l’énergie, le télécom, l’agriculture, le phosphate, le tourisme.. Aujourd’hui, on a une Bourse de PMEs et elle ne peut pas assurer à ses investisseurs institutionnels tunisiens ou étrangers la profondeur et la liquidité qu’il faut pour leur permettre d’arbitrer au gré de la conjoncture ».
L’Etat est un très mauvais gestionnaire
A propos de l’intervention du chef du gouvernement lors de son passage à la télévision, M.Sahnoun laisse entendre qu’il partage intégralement le point de vue de Elyes Fakhfekh, portant sur le fait que l’Etat est un très mauvais gestionnaire : « l’Etat doit jouer son rôle de régulateur et de moralisateur ».
Quant au volume quotidien moyen, le DG a fait savoir que : « la Cote faisait en 2010, 10,8 millions de dinars en moyenne quotidienne. En 2013, on touchait 6,3 millions de dinars. Après, on a reparti à la hausse pour retrouver les 10,8 millions de dinars en 2018. On a réussi à retrouver le même niveau de 2010 en 2018. En 2019, on a fait que 7,2 millions de dinars et cette année, on ne fera que 5,1 millions de dinars ».