» Il faut accepter de faire le sacrifice de sauver l’économie et les entreprises, car au-delà de l’aspect sanitaire, la crise liée au coronavirus, aura un impact énorme et difficile à mesurer sur le plan économique et sur les entreprises », a affirmé l’économiste, Ezzedine Saïdane, dans une déclaration à l’agence TAP.
«Parallèlement aux efforts déployés sur le plan sanitaire, il faut consentir des efforts similaires pour éviter que nos entreprises ne s’effondrent. Ce risque résulte d’abord, du manque de liquidité, puisqu’il y a un très sérieux problème de liquidité dans le pays, qui ne peut être réglé que par des mesures à prendre d’une part par la Banque centrale de Tunisie et les banques de la place, en reportant les échéances des crédits et en fournissant de nouveaux crédits lorsque c’est nécessaire pour maintenir les entreprises à flot sur le plan de leurs paiements, et d’autre part, par l’Etat, à travers le ministère des Finances, pour tout ce qui est report des échéances d’impôt et même des échéances relatives aux caisses sociales » a-t-il estimé.
Et d’ajouter « dans certains pays, les Banques Centrales sont allées plus loin pour maintenir les banques à flot, en leur fournissant de la liquidité supplémentaire, soit directement pour financer une partie de leur portefeuille de crédits, soit pour racheter les bons de trésors mais aussi pour financer de nouvelles émissions de bons de trésors. C’est ce que nous sommes aujourd’hui obligés de faire ». Evidemment, reconnait-il « ceci va avoir des conséquences sur l’endettement, l’inflation, la croissance économique qui sera certainement négative pour l’année 2020, mais quand la maison brûle, on ne compte pas les litres d’eau pour éteindre l’incendie ».
Toujours selon lui, «le plus important aujourd’hui, c’est de sauver l’économie et les entreprises parce qu’il sera plus coûteux de remplacer une entreprise qui s’effondre et qui fait faillite, que de la maintenir aujourd’hui à flot, même d’une façon artificielle, en attendant que cette crise passe ».
«Il va y avoir un coût économique très important de la gestion de cette crise, mais l’objectif doit être de sauver l’économie et les entreprises, car c’est seulement ainsi qu’on pourra sauver les emplois et notre capacité de production et d’approvisionnement de nos marchés. Il ne faudrait pas qu’il y ait la moindre hésitation à anticiper plutôt que de suivre l’évolution de la crise » a t-il souligné.
« Il ne faut pas être en retard même de quelques jours, par rapport à l’évolution de cette crise et de son impact. Il faut être en avance. Et c’est dans ce sens que je considère que la mesure prise par la BCT de réduire de 100 points de base, son taux directeur est une mesure très insuffisante qui consiste à suivre la crise plutôt que de l’anticiper. Certaines pays n’ont pas hésité à remettre à Zéro leur taux d’intérêt, parce qu’ils considèrent que le sauvetage de l’économie est un objectif primordial qui doit aller de pair avec les efforts sur le plan sanitaire ».
A la question de savoir si la situation économique et financière dans le pays permet de telles mesures, Saïdane considère que « malheureusement, cette crise intervient à un moment où l’économie est très affaiblie et où les indicateurs essentiels ( croissance, taux d’inflation, dette publique, dette extérieure, déficit de la balance commerciale …) sont gravement détériorés. Mais malgré cette situation, il faut accepter de faire le sacrifice de sauver l’économie et les entreprises, pour éviter leur effondrement ».