L’agence de notation internationale Fitch Ratings s’attend à ce que “la détérioration de la qualité des actifs sous-jacents devienne de plus en plus visible”, lorsque le programme de report des échéances de crédits de la Tunisie expirera en septembre 2021.
La monnaie tunisienne n’a plus de valeur à cause de l’inflation qui a connu une progression rapide en court laps de temps. Par conséquent, la qualité des crédits n’est pas au top. Les hommes d’affaires et les particuliers qui ont recours aux crédits bancaires ne sont pas pour autant au bout de leurs souffrances. Ils ont besoin de plus de ressources financières pour payer des projets très coûteux. D’autant plus que le taux d’intérêt imposé est très élevé et rend le crédit très cher. A titre d’exemple, pour acheter une propriété immobilière, il faut payer trois fois plus sa valeur initiale.
C’est aussi le cas pour les autres projets comme les extensions et la création d’entreprises. La qualité des crédits bancaires tunisiens devrait encore s’affaiblir en 2021, en raison de l’environnement difficile dans lequel opèrent toujours les banques tunisiennes suite à la pandémie de Covid-19, indique Fitch Ratings dans un nouveau rapport tout en maintenant la perspective négative. A noter que les chefs d’entreprise ont bénéficié d’un rééchelonnement de leurs crédits échus, et ce, pour alléger le fardeau des promoteurs et leur permettre de repartir sur des bases solides en leur donnant l’occasion de relancer leur activité. Or, un tel report de remboursement des crédits a causé sur le court terme un manque à gagner pour les institutions financières qui ont tablé sur des revenus immédiats suite aux crédits octroyés.
« La qualité des actifs en détérioration »
L’agence de notation internationale s’attend, en tout cas, à ce que “la détérioration de la qualité des actifs sous-jacents devienne de plus en plus visible”, lorsque le programme de report des échéances de crédits de la Tunisie expirera en septembre 2021 et que certaines mesures d’exemption pour les banques prendront fin au terme de 2021. Mais la décision du report du remboursement des crédits de la BCT s’est imposée d’ellemême vu le contexte économique difficile dû au Covid qui a mis à rude épreuve plus d’une entreprise. D’ailleurs, une plateforme a été mise à la disposition des entreprises impactées par les effets de la pandémie pour bénéficier d’une aide de l’Etat à condition de préserver le nombre d’employés. L’agence de notation attire l’attention sur l’impact du passage à l’IFRS 9 (normes comptables bancaires) à partir de la fin de l’exercice 2021, sur l’affaiblissement des mesures de la qualité des actifs déclarés et la nécessité des provisions supplémentaires. Plusieurs banques ne se sont pas bien préparées à ce passage important qui va nécessiter l’utilisation de nouvelles méthodes comptables analytiques et précises. Les banques sont appelées à investir dans cette nouvelle méthode comptable en intégrant la totalité de leur comptabilité dans l’IFRS. “Notre évaluation de la qualité des actifs des banques tunisiennes rend compte de leur forte exposition a la notation souveraine affaiblie (“B”/négatif) à travers des avoirs en titres d’Etat et de prêts directs à l’Etat”, lit-on dans le communiqué publié par Fitch Ratings. Les banques qui ont réalisé, globalement, des revenus positifs au cours des dernières années sont tenues de donner plus d’importance à la gestion comptable et à prendre les mesures prudentielles lors de l’octroi des nouveaux crédits.
Une faible rentabilité
L’agence de notation estime que l’exposition des banques à la notation souveraine représentait environ 15% des actifs du secteur à la fin novembre 2020, ce qui est considérable, et s’attend à une rentabilité faible en 2021, en raison des faibles taux d’intérêt, de l’activité commerciale modérée et d’une reprise retardée du secteur clé du tourisme. En fait, la situation économique et financière se répercute directement sur les revenus des banques. Quand l’activité économique est stagnante comme c’est le cas actuellement, les activités des banques se trouvent gravement touchées. Elles se trouvent en manque de liquidités et ne peuvent plus octroyer des crédits à un rythme rapide. D’où la nécessité d’assurer une reprise des activités économiques en mobilisant, à cet effet, tous les moyens susceptibles de relancer les secteurs sinistrés comme l’industrie, le tourisme, le transport et les services. Les charges liées à la créance douteuse devraient, de même, rester élevées, compte tenu de la gravité des risques liés à la qualité des actifs, ce qui pèsera également sur la rentabilité, selon l’agence. Il est temps d’engager la réflexion sur la mission future des banques et leur rôle dans la digitalisation et le financement de l’économie et du secteur privé afin de trouver des solutions appropriées de nature à améliorer les performances des banques et leur permettre de relever les défis.
Chokri GHARB