Italie : Dégradation des conditions globales de l’économie et risque de récession en 2019
À la fin de l’année 2018, l’Italie et la Commission européenne sont parvenues à un accord sur une nouvelle loi de finances, permettant d’éviter la procédure pour déficit excessif. En 2019, le gouvernement vise un déficit public limité à 2% du PIB (contre 2,4% précédemment) ; il révise aussi en baisse la croissance du PIB, estimée à +1 % (contre +1,5 % initialement). Ce scénario s’annonce, toutefois, difficile à tenir, car les conditions globales de l’économie italienne se sont dégradées ces derniers mois. Au troisième trimestre de 2018, le PIB a reculé de 0,1 %, les investissements privés et publics ayant sensiblement diminué.
Dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance, la Commission européenne a identifié, en novembre 2018, dans le projet de budget italien pour 2019, l’existence d’une non-conformité particulièrement grave avec les recommandations précédemment adressées par le Conseil, et a pointé le risque d’un retour en arrière dans les réformes structurelles.
■ Nouvel accord avec l’Union européenne
À la fin de l’année dernière, un accord a été conclu entre le gouvernement italien et la Commission européenne, qui a permis d’éviter la procédure de déficit excessif. Malgré le ralentissement attendu de la croissance économique (+1 % en 2019, contre +1,5 % selon les estimations précédentes), le déficit public devrait à présent s’établir à 2 %, soit 0,4 % en dessous du projet de budget précédent, pour reculer ensuite à 1,5 % en 2021. En 2019, l’amélioration du solde des opérations des administrations publiques résulte à la fois de la hausse des recettes (+ EUR 1,7 mds) et de la baisse des dépenses (-8,7 mds). Le scénario pour 2020-2021 n’en reste pas moins lourd de défis, puisque la réduction du déficit public tient principalement à l’activation des clauses de sauvegarde ayant pour effet de déclencher une hausse annuelle des recettes de TVA de près de EUR 30 mds.
■ Risque de récession
Entre le début de 2014 et le milieu de 2018, le PIB italien, qui avait perdu près de 10 points de pourcentage pendant la crise, s’est redressé de 4,5 points. Le rebond s’est toutefois interrompu au troisième trimestre (T3) de 2018. Le PIB réel est ressorti en baisse (-0,1 % trimestre sur trimestre, t/t), enregistrant ainsi le premier repli trimestriel en près de quatre ans. Le taux de croissance en glissement annuel s’est établi à 0,7 %, contre +1,7 % au milieu de 2017. Les dernières données d’activité laissent présager un risque de nouvelle contraction au dernier trimestre 2018. Ainsi, en novembre la production industrielle a chuté de 2,6 % (g.a.).
Au T3, la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière a baissé de 0,5 % (t/t), enregistrant une quasi-stagnation en base annuelle. La détérioration des conditions économiques a principalement affecté les secteurs qui avaient beaucoup contribué à la reprise. La fabrication de produits pharmaceutiques a reculé de plus de 6 % et la production automobile, de près de 10 %. Pour la première fois depuis le début de 2014, la valeur ajoutée des services a diminué tandis que celle du secteur du bâtiment a poursuivi son redressement même si elle se maintient à plus de 30 points de pourcentage en dessous du niveau de 2008.
Baisse de la consommation et de l’investissement
La contraction du PIB au T3 tient à la contribution négative de la demande intérieure qui, abstraction faite des stocks, a amputé la croissance totale de 0,3 %, reflétant une plus grande prudence de la part des consommateurs et des entreprises. Les ménages italiens ont pâti du sérieux tassement du marché du travail, le nombre de personnes occupant un emploi étant resté quasiment inchangé au cours des six derniers mois. Au T3, la consommation privée a reculé de 0,1 %, freinée par des pertes de pouvoir d’achat, la dégradation de la confiance des ménages sous l’effet de la chute des prix des actifs, et une augmentation de l’épargne de précaution. Les ménages italiens ont encore réduit leurs dépenses en biens de consommation non durables (-1% g.a.), tandis que les dépenses de services ont légèrement augmenté.
L’incertitude politique intérieure et l’aggravation des tensions géopolitiques pèsent sur la confiance des chefs d’entreprises, qui a atteint son niveau le plus bas depuis trois ans et demi. La contraction économique freine également le redressement de la rentabilité des entreprises. Au troisième trimestre, l’excédent brut d’exploitation en pourcentage de la valeur ajoutée a reculé à 41,4 %, en retrait de plus de deux points de pourcentage par rapport à deux ans auparavant. Conséquence, les sociétés non financières italiennes ont de nouveau repoussé leurs dépenses d’investissement et accru leur matelas de liquidités avec une épargne de près de EUR 360 mds. De plus, les investissements publics ont fortement chuté, reculant en termes nominaux de plus de 10 % (g.a.) au T3. De juillet à septembre, la formation brute de capital fixe a retranché 0,2 point à la croissance globale du PIB.
Exportations : une reprise incertaine
Après une chute en septembre, les exportations italiennes ont enregistré une hausse de +9,6 % (g.a.) en octobre, avant de se stabiliser en novembre. Pendant les onze premiers mois de l’année, les ventes à l’étranger ont atteint à EUR 386 mds, 3,5 % de plus que pour la même période de 2017. Par ailleurs, la valeur des biens importés s’est élevée à environ EUR 391 mds (+5,7 %, g.a.). Parmi les principaux biens exportés, les produits de la métallurgie et du travail des métaux ont progressé de 5,7 % (g.a.), les produits pharmaceutiques de +8 % (g.a.), les machines-outils et matériels de +2,3 % (g.a.), les produits alimentaires de +3 % (g.a.) et les produits textiles de +3,6 % (g.a.) entre janvier et novembre. Les exportations de moyens de transport ont également augmenté alors que les exportations automobiles ont chuté de 5,8 % sur les dix premiers mois de l’année. Au cours de la même période, les importations automobiles sont restées pour l’essentiel inchangées (0,1%), générant un solde commercial négatif d’environ EUR 9,8 mds pour le secteur.
Concernant la destination des exportations italiennes, les ventes aux pays de l’UE ont progressé de 4,4 %, entre janvier et novembre, et celles aux pays non membres de l’UE, de 2,4 %. Résultat, les exportations intra-UE ont représenté 56,8 % du total des exportations italiennes au cours des onze premiers mois de 2018, en légère hausse par rapport à l’ensemble de l’année 2017 (55,7 %) et de l’année 2016 (55,9 %). Pour ce qui est, en particulier, des pays de l’UE, les exportations italiennes ont fortement progressé à destination des Pays-Bas (+12,1 %), de la Pologne (+7,4 %), de l’Autriche (+6,5 %), de la France et de l’Allemagne (+4,4 et + 4,1 % respectivement). Ces deux derniers pays restent les principales destinations des ventes italiennes à l’étranger avec une part de
marché de 10,5 % et 12,7 %, respectivement, en légère hausse par rapport à 2017. Les exportations vers les pays non membres de l’UE ont augmenté, en particulier celles vers vers l’Inde (+11,9 %), pays qui reste néanmoins une destination marginale pour les exportations italiennes, la Suisse (+8,8 %), et les États-Unis (+6,2 % grâce au pic de +15,8 % enregistré en novembre).
Au cours des années 2012 à 2016, les sociétés exportatrices italiennes ont vu le montant moyen de leurs exportations augmenter de EUR 1,93 million à EUR 2,02 millions. Ce chiffre découle de l’accroissement du montant exporté pendant la période (+7,5 %), une progression plus de deux fois supérieure à celle du nombre d’opérateurs à l’exportation (+3 %, soit 5 750 unités supplémentaires). Cette évolution concerne l’ensemble des entreprises de 20 salariés et plus. Sur la même période, le nombre moyen de pays importateurs par entreprise a également grimpé à 6,2 en moyenne ; pour autant, la part des exportateurs n’ayant qu’un seul client à l’international est restée inchangée après avoir légèrement diminué au cours des dernières années. La (légère) progression du nombre de marchés desservis ne s’est pas accompagnée d’une plus grande diversification des biens vendus. Celle-ci reste en effet limitée : plus de la moitié des opérateurs n’exportent qu’un seul produit et la grande majorité (94 %) exportent moins de 10 produits. Malgré une plus grande diversification des marchés, 50 % des entreprises exportatrices italiennes desservent aujourd’hui deux pays au plus, et représentent globalement 4 % environ des exportations totales de l’Italie. Cette situation est assez comparable à celle d’autres pays. Cependant, avec l’augmentation de la taille des entreprises, la diversification des marchés à l’export des opérateurs italiens reste plutôt limitée alors qu’elle croît sensiblement en France et en Allemagne.