Malgré les investissements importants réalisés par la Tunisie dans le secteur agricole au cours des décennies écoulées, une partie importante de la population rurale continue de vivre avec des revenus modestes, notamment dans les régions les plus défavorisées du pays. Le Gouvernement tunisien s’est donné pour objectif, avec l’appui de la Banque à travers le Document de stratégie pays (DSP 2017-2021), de réduire les disparités régionales en investissant davantage dans ces régions. Les régions concernées par le projet, à savoir Sidi Bouzid, Kairouan et Kasserine, comptent parmi les plus défavorisées du pays. Elles sont respectivement 20ème, 22ème et 23ème sur un total de 24 régions selon l’indice de développement régional mesuré en 2015. Le Projet de valorisation des périmètres irrigué à travers le développement des chaines de valeur (PVPI-DCV) vient contribuer au développement de zones rurales dans ces régions.
1.2 Le PVPI-DCV a pour objectif de contribuer à améliorer les revenus des populations des Gouvernorats de Kairouan, Kasserine et Sidi Bouzid à travers le développement des chaines de valeur agricole. Le Projet bénéficiera directement à 3.558 ménages soit environ 20.000 personnes dont plus de 50% de femmes. Le coût HT du projet est de 59,708 Millions d’Euro (157,629 MDT) financé conjointement par la BAD (47,2%), l’AGTF (17,5%), le Gouvernement (24,6%) et les bénéficiaires (10,7%). Les principales réalisations attendues du Projet sont les suivantes : (i) Amélioration des techniques culturales et augmentation des rendements de 20 à 30% et de la qualité des produits; (ii) Accès au financement à travers les mécanismes existants pour 15 Sociétés mutuelles de services agricoles (SMSA) constituées; (iii) renforcement des capacités de 23 Groupements de développement agricole (GDA) pour une gestion efficace de l’eau et des infrastructures d’irrigation et réhabilitation de périmètres irrigués sur 9.000 ha nets; (iv) appui à la constitution et au renforcement des capacités de 15 Sociétés mutuelles de services agricoles (SMSA) ; (v) appui financier à ces SMSA par la contribution au financement de sous-projets dans le domaine du développement des chaines de valeur (points de ventes d’intrants, matériel de travaux des sols, équipements de récoltes, chambres frigorifiques, transformation des produits agricoles); les SMSA féminines seront les premières bénéficiaires de cet appui; (vi) appui aux SMSA dans la labélisation de leurs produits au profit de 1.000 agriculteurs; (vii) l’aménagement de 32 km pistes rurales pour faciliter l’accès aux zones de production et aux marchés.
Evaluation des besoins
Une étude de diagnostic du fonctionnement des chaines de valeur des périmètres irrigués a été menée durant la préparation du Projet. Elle conclut que les petits agriculteurs de la zone du Projet ne sont pas suffisamment organisés pour optimiser la mise en valeur de leurs périmètres et l’accès au marché. Ce manque d’organisation conduit à des pertes d’opportunités à plusieurs niveaux. Les approvisionnements en intrants se font individuellement alors qu’un achat groupé aurait permis de réaliser des économies d’échelle. Le même problème se pose au niveau de la commercialisation qui se fait généralement à travers des intermédiaires et parfois sur pieds pour les pommes et les olives. Le manque d’organisation empêche aussi les agriculteurs d’investir dans la conservation et ou la transformation de leurs produits afin d’en améliorer la valeur ajoutée. S’ils étaient organisés en SMSA solides ayant des actifs, les agriculteurs pourraient accéder plus facilement au crédit bancaire et aux incitations de la nouvelle loi de l’investissement, spécifiques aux SMSA. Enfin, les aménagements hydroagricoles, principal outil de production de ces agriculteurs, datent de plus de 30 ans et ont un besoin urgent de réhabilitation. Le PVPI-DCV vient contribuer à lever ces contraintes.
Valeur ajoutée de la Banque
La Banque est bien placée pour appuyer le PVPI-DCV étant donné l’alignement de ce projet avec sa stratégie « Nourrir l’Afrique » et avec l’approche centrée sur le développement des chaines de valeur agricoles adoptée dans cette stratégie. La transformation de l’agriculture africaine dans le cadre de la Stratégie « Nourrir l’Afrique » est envisagée à travers 7 catalyseurs qui sont pour la plupart pris en compte dans la conception de la présente opération (Accroissement de la productivité, valorisation de la production, investissement dans les infrastructures, financement, inclusivité et durabilité). Enfin, l’expérience accumulée par la Banque à travers ses interventions antérieures dans l’appui au Secteur agricole notamment en Tunisie, milite en faveur de cette intervention qui devra permettre de consolider les acquis notés en matière d’investissements en milieu rural, et d’ambitions affichées du pays en faveur d’une pleine valorisation des périmètres irrigués.
Développement des connaissances
Le Projet contribuera à renforcer par la formation et l’assistance technique, les connaissances techniques et managériales des agriculteurs et de leurs organisations (GDA et SMSA) ainsi que celles des services techniques de l’agriculture. Il réalisera, en particulier dans ce cadre, les activités suivantes : (i) diffusion de technologies améliorées et des bonnes pratiques sur des parcelles de démonstration dans les périmètres ; (ii) élaboration d’un catalogue des technologies et pratiques agricoles résilientes ; (iii) élaboration, édition et distribution d’un guide de bonnes pratiques de gestion environnementale des périmètres irrigués et formations des acteurs sur ce guide ; (iv) appui à la structuration du monde rural à travers la création et le renforcement de SMSA et de GDA et développement de relation d’affaires entre ces structures et les autres acteurs des chaines de valeur (industriel du secteur privé, banques commerciales…). Enfin, des leçons tirées au fur et à mesure de l’exécution du projet seront également valorisées par le Banque dans le cadre de la conception de ses futurs projets, y compris ailleurs en Afrique.