Le coût de risque pour la Tunisie est passé de 5,6% en février 2020 à 10 % en avril 2020
Afin de discuter les différentes dispositions et mesures prises par le Gouvernement et la Banque Centrale de Tunisie (BCT) en faveur des PMEs et des start-ups pour atténuer les effets négatifs de la crise sanitaire, une visioconférence a été organisée conjointement par la Banque de financement des petites et moyennes entreprises (BFPME) et l’association tunisienne pour la promotion de la culture financière (ATCF). Le débat s’est articulé autour de ce qui a été fait et ce qui reste à faire.
Pour sa part, Mohamed Salah Frad, Président de l’Association Tunisienne des Investisseurs en Capital (ATIC) a insisté sur la nécessité de faire du secteur de la santé un secteur prioritaire au sein du code de l’investissement.
Il faut lui concéder les avantages nécessaires, a-t-il ajouté.
Le président de l’ATIC a précisé qu’aujourd’hui, la priorité des priorités c’est de restructurer les entreprises notamment en finançant le Besoin en Fonds de Roulement « BFR » et les besoins à court termes. Et c’est pour ça, indique t-il, il a été demandé d’activer et vulgariser la loi transversale qui institue un cadre fiscal avantageux pour les opérations de restructuration. Et de poursuivre : « Vu l’ampleur de cette crise, je pense qu’on aura besoin encore plus de support et une mobilisation de plus de fonds ».
« Ce qui ne se mesure pas n’existe pas »
D’autre part, Walid Ben Salah, expert-comptable a présenté quant à lui sa lecture pour les mesures et les dispositions prises par le gouvernement : « Ce qui ne se mesure pas n’existe pas.
Aujourd’hui, malheureusement on est en train de prendre des mesures aussi bien au niveau du gouvernement qu’au niveau de la BCT mais jusqu’à maintenant on n’a pas communiqué sur les estimations de l’impact de la crise tout d’abord et de l’impact de ses mesures sur les finances publiques et d’ailleurs sur le secteur bancaire. Je me rappelle que les premières mesures ont été présentées par l’institut d’émission fin mars 2020.
Après la mise en place des circulaires, en ce moment là, il a été demandé aux banques d’établir des scénarios avec des stress tests pour estimer l’impact de ses mesures sur leurs comptes.
Il y avait une mauvaise surprise parce que l’impact est très important. D’ailleurs, jusqu’à présent, il n’y a pas des solutions adéquates pour pouvoir amortir ce choc ».
Les banques perdent un chiffre d’affaires important sur tout ce qui est activités de change
L’expert a fait savoir que le report des crédits coûte les banques 2 milliards de dinars rien que sur le report des crédits accordés aux particuliers, dont 1 milliard de dinars d’intérêt. Et d’ajouter : « Pire encore, il a été demandé aux banques de garder les mêmes échéances donc les banques vont comptabiliser des pertes.
Alors qu’en moment de crise, deux acteurs majeurs devaient être au rendez-vous : l’Etat et le secteur bancaire.
Ce sont les secteurs qui ont la possibilité de redresser la situation économique et de financer l’économie de nouveau.
Lorsqu’on impacte le secteur bancaire avec des reports de ce genre, ça va créer des tensions de liquidité et affecter leurs résultats. Mis à part que la baisse du taux directeur va toucher le PNB.
Déjà, les banques ont perdu un chiffre d’affaires important sur tout ce qui est activités de change. Tout le monde s’attend aussi à ce que le taux de risque va augmenter.
Autre chose, les entreprises sont en train de réviser leurs business plans vers la baisse de l’activité et de bénéfice ».
La masse des billets de banque en circulation est passée de 12,5 milliards de dinars à 15,1 milliards de dinars
Parlons de l’informel et sa prolifération, M. Ben Salah a souligné que la masse des billets de banque en circulation est passée de 12,5 milliards de dinars il y a moins de 2 mois à 15,1 milliards de dinars. 2,5 milliards de dinars qui sont en dehors du circuit bancaire.
L’expert a appelé à mesurer l’impact des mesures : « Il est nécessaire de faire une estimation d’impact de la crise, des mesures prises aussi bien sur le budget de l’Etat, que sur les entreprises, le secteur bancaire et financier. Avec les deux dernières notations de Moody’s et de Fitch, la sortie sur le marché international est devenue très difficile .
Et si on arrive à sortir avec la garantie d’une autre institution ou un autre pays, ça va être très coûteux pour le pays sachant que le coût de risque pour la Tunisie est passé de 5,6% en février 2020 à 10 % en avril 2020. Pratiquement le double en deux mois ».