Le projet de la loi de finances pour 2025 (PLF 2025), une fois adopté, permettra une augmentation des salaires pour les fonctionnaires qui perçoivent des revenus inférieurs à 2800 dinars par mois, grâce à une révision de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). Cette annonce a été faite par Bassem Ennaifer, analyste économique et financier, dans une interview accordée à l’agence TAP. Ennaifer a précisé que ce projet de loi poursuit trois objectifs majeurs : améliorer le pouvoir d’achat des citoyens, stimuler l’activité économique, et mobiliser des ressources budgétaires supplémentaires. Le gouvernement a prévu une série de mesures pour concrétiser ces objectifs, notamment celles visant à renforcer le rôle social de l’État et à améliorer les conditions de vie des citoyens.
Réforme fiscale et équité
Une des principales mesures du PLF 2025 est la révision de la grille de l’IRPP, instaurant un impôt progressif pour garantir une répartition plus équitable de la pression fiscale. Cela devrait permettre de réduire les disparités entre les différentes catégories sociales et renforcer le pouvoir d’achat des ménages à faibles revenus et des classes moyennes. En pratique, cette réforme entraînera une réduction de l’impôt pour les personnes ayant un revenu mensuel inférieur à 2800 dinars, augmentant ainsi directement leurs salaires. Ennaifer explique que plus le salaire est bas, plus l’impact de la baisse de l’impôt sera important. Par exemple, pour un salaire mensuel de 700 dinars, le revenu net après impôts pourrait passer à 750 dinars.
Cependant, cette révision sera moins avantageuse pour les salariés dont les revenus dépassent 2800 dinars, qui seront soumis à une taxation plus élevée. Pour les personnes dont le revenu annuel imposable dépasse 50 000 dinars, le taux d’imposition passera de 35 % à 40 %. En outre, trois nouveaux fonds sociaux seront mis en place pour protéger les femmes travaillant dans l’agriculture, assurer une indemnisation en cas de perte d’emploi, et compenser les victimes d’accidents de la route.
Réduction des taxes et soutien au pouvoir d’achat
Le PLF 2025 inclut aussi une réduction de la TVA sur l’électricité, passant de 13 % à 7 % pour les ménages à faibles revenus, ainsi qu’une extension du programme d’accès au premier logement dans les régions intérieures. D’autres réductions de TVA sont également prévues sur divers produits. Ennaifer souligne que l’objectif global de ces mesures est de renforcer le pouvoir d’achat des citoyens, ce qui pourrait stimuler la consommation et la demande sur le marché local, moteur de la relance économique. Par ailleurs, la collecte de la TVA sur la consommation permettra à l’État de mobiliser des ressources budgétaires supplémentaires.
Ennaifer ajoute que ces réformes pourraient également encourager l’épargne, notamment grâce aux gains d’impôt réalisés sur les salaires. Une augmentation de l’épargne offrirait à l’État et au marché financier davantage de ressources à investir sur le moyen et long terme. Toutefois, il met en garde contre un risque d’inflation si la hausse de la demande n’est pas accompagnée d’une augmentation équivalente de l’offre.
Dynamisation de l’économie et ressources budgétaires
Le deuxième objectif du PLF 2025 concerne l’impulsion de l’activité économique. Pour ce faire, des lignes de crédit seront mises en place en faveur des catégories sociales vulnérables et des personnes handicapées souhaitant lancer des micro-entreprises. Ces crédits seront octroyés sans autofinancement ni intérêt. Des mesures supplémentaires visent à soutenir les PME, notamment les startups, avec des financements, des garanties et des allocations, afin d’améliorer leur inclusion financière et renforcer leur capacité à embaucher.
En parallèle, les sociétés communautaires, les auto-entrepreneurs et les free-lancers bénéficieront également d’avantages fiscaux et de nouvelles lignes de crédit. L’État vise également à mobiliser plus de ressources pour le trésor public en assurant une équité fiscale progressive et en luttant contre l’évasion fiscale.
Nouvelles taxes pour les entreprises
Dans ce contexte, le PLF 2025 propose une révision du taux d’imposition sur les sociétés, qui sera désormais progressif en fonction du chiffre d’affaires ou de l’activité. Ainsi, les entreprises opérant dans les secteurs de l’agriculture, du développement régional, de la lutte contre la pollution ou de l’artisanat resteront soumises à un taux de 10 %, indépendamment de leur chiffre d’affaires. En revanche, les sociétés financières, telles que les banques, les compagnies d’assurances et les établissements financiers, seront taxées à hauteur de 40 %. D’autres secteurs, tels que les opérateurs de télécommunication, les compagnies pétrolières et les concessionnaires automobiles, seront imposés à 35 %.
Les autres entreprises verront leur impôt varier selon leur chiffre d’affaires : 15 % pour celles générant moins de 5 millions de dinars (MD), 20 % pour un chiffre d’affaires compris entre 5 et 20 MD, et 25 % pour celles dépassant 20 MD. Ennaifer précise que ce nouveau barème allègera la charge fiscale pour les petites entreprises, qui représentent la majorité du tissu économique tunisien.
Il souligne que près de 80 % des recettes fiscales issues de l’impôt sur les sociétés proviennent de celles soumises aux taux de 35 % et 40 %. Enfin, l’effort de lutte contre l’évasion fiscale, notamment dans les secteurs de la santé et de l’assurance maladie, sera intensifié. L’administration fiscale sera également habilitée à intervenir lors des contrôles fiscaux pour vérifier la valeur réelle des actifs et des fonds de commerce, afin de combattre les fausses déclarations et les sous-déclarations.