L’annonce de la future interconnexion électrique « ELMED » entre la Tunisie et l’Italie marque un tournant décisif dans la collaboration énergétique entre les deux nations. Ce projet d’envergure, qui établira la première liaison en courant continu entre l’Afrique et l’Europe, consolide les liens stratégiques unissant Tunis et Rome, déjà solidement ancrés dans divers secteurs clés tels que l’économie et l’énergie.
ELMED : Un pont énergétique bidirectionnel entre l’Afrique et l’Europe
Pour les acteurs tunisiens du secteur des énergies renouvelables présents à l’exposition internationale « Key-The Energy Transition exhibition » à Rimini, en Italie, l’interconnexion ELMED est perçue comme un véritable « pont énergétique ». Sa mise en service, prévue pour 2028, ouvrira une voie stratégique pour l’Europe, lui permettant d’accéder aux ressources énergétiques abondantes de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
Ce projet s’inscrit dans la continuité d’une coopération transméditerranéenne initiée dès 1977 avec le Gazoduc Transmed, reliant l’Algérie à l’Italie via la Tunisie. Ce pipeline, long de 2 475 km, dont 370 km traversent le territoire tunisien, a déjà contribué à renforcer les liens énergétiques entre ces pays.
Des avantages mutuels pour l’Italie et la Tunisie
L’interconnexion ELMED revêt une importance capitale pour l’Italie, confrontée à une demande croissante en électricité. En juillet 2024, cette demande a atteint 31,3 milliards de kilowattheures (kWh), soit une augmentation de 4,5 % par rapport à la même période en 2023, selon les données de TERNA, le gestionnaire du réseau électrique national italien.
Pour la Tunisie, ce projet représente une avancée majeure en matière de sécurité d’approvisionnement énergétique, en particulier pendant la saison estivale, période de pics de consommation exacerbés par le réchauffement climatique. « Cette interconnexion permettra à la Tunisie de réduire la pression sur son réseau électrique en été, tout en lui offrant une opportunité d’exporter son énergie verte vers l’Europe », souligne Ali Kanzari, président de la Chambre syndicale des intégrateurs de systèmes photovoltaïques, lors d’un débat sur l’électrification de l’Afrique à l’exposition de Rimini.
Un projet ambitieux pour une intégration énergétique renforcée
La liaison électrique reliera la station de Partanna en Sicile à celle de Mlaabi à Menzel Temim (Cap Bon), sur une longueur totale d’environ 220 km, dont 200 km en câble sous-marin. Elle aura une capacité de 600 MW et sera posée à une profondeur maximale de 800 m sous le niveau de la Méditerranée. Selon les experts du secteur, cette infrastructure favorisera l’intégration des systèmes énergétiques de l’Union européenne et de l’Afrique du Nord, en facilitant l’optimisation des sources de production, le partage des ressources d’équilibrage et l’augmentation de la flexibilité opérationnelle des réseaux électriques des deux rives de la Méditerranée.
Lors de l’événement de Rimini, les experts ont insisté sur la nécessité d’accélérer le développement des énergies renouvelables, de moderniser les infrastructures électriques et d’investir dans des solutions de stockage d’énergie pour garantir un accès universel à une électricité fiable, sûre et abordable.
Un partenariat économique et énergétique solide
Au-delà de la coopération énergétique, l’Italie demeure un partenaire économique de premier plan pour la Tunisie. Elle est le deuxième fournisseur du pays, avec un volume d’échanges commerciaux bilatéraux avoisinant 7,1 milliards d’euros, selon l’ambassade d’Italie à Tunis. L’Italie se positionne également comme le deuxième investisseur en Tunisie, détenant une part de marché de 16 %.
Selon les données de l’Agence de Promotion de l’Investissement Extérieur (FIPA) et de l’Agence de Promotion de l’Industrie et de l’Innovation (API), environ 800 entreprises italiennes opèrent en Tunisie, principalement dans un régime off-shore axé sur l’exportation. Ces sociétés, à capitaux exclusivement italiens ou mixtes, emploient plus de 60 000 personnes, représentant près d’un tiers des entreprises à participation étrangère dans le pays.
Le secteur du textile et de l’habillement domine la présence industrielle italienne en Tunisie, avec une forte concentration d’entreprises dans le Grand Tunis et les régions côtières, impliquant aussi bien des PME que des groupes industriels d’envergure.
Enfin, la participation d’une délégation tunisienne à la 3ème édition de « Key Energy Transition 2025 » à Rimini, qui a réuni des délégations de 50 pays, témoigne de l’importance accordée à cette coopération. La prochaine édition est d’ores et déjà annoncée pour les 4 au 6 mars 2026.