En juin 2020, l’ancien chef du gouvernement Elyes Fakhfakh a tiré la sonnette d’alarme sur l’état des finances publiques. Il a fait savoir que l’économie nationale serait à la dérive tout en indiquant que la situation a atteint un niveau inextricable notamment en ce qui concerne le ratio de l’endettement. Et de préciser encore : « La dette tunisienne a atteint les 92 milliards de dinars (environ 30 milliards d’euros).
La dette extérieure du pays a dépassé la ligne rouge en atteignant 60% du PIB et ne doit plus augmenter ». Toutefois, l’état des lieux actuel nous oblige à nous endetter davantage. Pour rappel, le taux d’endettement de la Tunisie en 2013 ne dépassait pas les 30% du PIB.
Est-ce qu’on pourrait stopper l’hémorragie de l’endettement ? Rien n’est évident, surtout que notre pays passe par une 2ème vague de la pandémie laissant libre court à l’incertitude.
Sans doute, la pandémie de COVID-19 a propulsé les niveaux d’endettement vers de nouveaux sommets. Dans le même contexte, le FMI vient de publier sur son site Web un article intitulé : « De la nécessité de réformer d’urgence l’architecture internationale de la dette ».
Le Fonds Monétaire indique que par rapport à la fin de l’année 2019, les ratios d’endettement moyens devraient, en 2021, augmenter de 20 % du PIB dans les pays avancés, de 10 % du PIB dans les pays émergents et de 7 % dans les pays à faible revenu. Ces augmentations, explique l’institution internationale, viennent alourdir des niveaux d’endettement déjà plus élevés que jamais. « Si de nombreux pays avancés peuvent encore emprunter, les pays émergents et les pays à faible revenu ont une capacité d’endettement bien plus limitée », ont averti les auteurs de l’article.
Prévenir une crise de la dette peut éviter aux pays de perdre dix ans
Le FMI a fait savoir qu’environ la moitié des pays à faible revenu et plusieurs pays émergents traversaient déjà ou risquaient fortement de traverser une crise de la dette, aussi cette nouvelle augmentation de la dette est-elle très inquiétante : « Alors qu’ils commencent à se remettre de la pandémie, nombre de ces pays pourraient connaître une deuxième vague de difficultés économiques, déclenchée par les défaillances, la fuite des capitaux et l’austérité budgétaire ». Selon ces auteurs, prévenir une telle crise peut leur éviter de perdre dix ans et leur permettre de se relever rapidement, les mettant ainsi sur la voie d’une croissance durable ».
Les auteurs ont affirmé qu’aucune crise de la dette n’est encore survenue, et ce, grâce aux mesures énergiques prises dès le début de la pandémie par les banques centrales, les autorités budgétaires, les créanciers bilatéraux officiels et les institutions financières internationales. « Quoiqu’essentielles, ces mesures deviendront sous peu insuffisantes », annonce le FMI.
Les pays en développement nécessiteront des financements supplémentaires à faible coût en 2021
Selon l’article, l’initiative de suspension du service de la dette appuyée par le G20 : réponse très positive à l’appel lancé par le FMI et la Banque mondiale, expire à la fin de cette année. « Les pays en développement nécessiteront des financements supplémentaires à faible coût en 2021 et au-delà, sachant que les besoins devraient rester élevés », a-t-elle ajouté.
Suspension du service de la dette en 2021
Le FMI a également, accordé un financement d’urgence à hauteur d’environ 31 milliards de dollars à 76 pays, dont 47 pays à faible revenu, ainsi qu’un allègement du service de la dette aux pays les plus pauvres dans le cadre du fonds fiduciaire d’assistance et de riposte aux catastrophes, a rappelé l’institution financière.
La plupart des mesures prises jusqu’à présent ont porté essentiellement sur la liquidité, à savoir, maintenir l’accès des pays au financement, tant par l’intermédiaire de sources officielles que du marché. Mais à mesure que la crise se poursuit, les problèmes de solvabilité, soit l’incapacité de rembourser les dettes, passent de plus en plus au premier plan. Pour prévenir une crise de la dette dans les pays en développement, il faut adopter d’urgence des mesures supplémentaires.
Le FMI voit qu’il est impératif de poursuivre l’initiative de suspension du service de la dette en 2021, faute de quoi ses bénéficiaires actuels seront contraints de recourir à des mesures d’austérité pour pouvoir assurer à nouveau le service de la dette, ce qui exacerberait les souffrances humaines déjà causées par la crise. La prorogation de l’initiative devrait favoriser l’adoption de mesures visant à remédier sans tarder aux problèmes de non-viabilité de la dette. De même, les pays présentant une vulnérabilité liée à la dette doivent y remédier d’urgence en adoptant à la fois des mesures de gestion de la dette et de croissance. Si la dette est insoutenable, elle doit être restructurée dès que possible. Les créances privées doivent être comptabilisées, s’il y a lieu. Fermer les yeux sur les problèmes de solvabilité ne fait qu’empirer les choses, a précisé le FMI
In fine, le FMI a mis l’accent sur l’obligation de réformer l’architecture internationale de la dette, qui comprend les contrats d’emprunt souverain, les institutions telles que le FMI et le Club de Paris ainsi que les cadres d’action favorisant la restructuration ordonnée de la dette, l’objectif étant d’alléger rapidement et suffisamment la dette des pays qui en ont besoin.