La Réserve fédérale américaine (Fed) est peut-être sur le point de réaliser quelque chose de « rare » en réduisant l’inflation sans affecter significativement l’emploi et la croissance économique, a déclaré jeudi un de ses responsables, plaidant pour une « grande prudence » sur les futures décisions de la banque centrale, quitte à ne pas se fier à l’historique des batailles passées.
« Croire aveuglement au caractère inévitable d’un compromis important entre l’inflation et le chômage comporte le risque sérieux d’une erreur de politique à court terme », a déclaré Austan Goolsbee, président de la Fed de Chicago. Il a critiqué la « vision traditionnelle » selon laquelle la baisse de l’inflation implique un ralentissement économique marqué, voire une récession, et une hausse du chômage.
Les déclarations d’Austan Goolsbee, préparées en vue d’une intervention au Peterson Institute for International Economics à Washington, n’indiquent pas explicitement qu’il s’oppose à toute nouvelle augmentation des taux d’intérêt, mais sont truffées d’avertissements sur les risques d’une interprétation erronée de la situation actuelle.
L’inflation, bien qu’en décélération, reste encore près de deux fois supérieure à l’objectif de 2% de la Fed.
Austan Goolsbee estime néanmoins que les recommandations préconisées par certains experts pour mettre un terme à la lutte contre l’inflation sont peut-être caduques. Citant une étude récente des responsables de la Fed de Chicago, il soutient que l’inflation pourrait « bientôt » atteindre l’objectif de 2% de la banque centrale américaine sans nouvelles augmentations de taux d’intérêt.
« S’en tenir aux simples corrélations historiques de ce que la croissance et les conditions du marché du travail signifient pour l’inflation face à l’évolution positive de l’offre est une recette pour provoquer une surréaction et un ralentissement (économique) inutile », a-t-il déclaré.
Austan Goolsbee est membre votant du FOMC, le comité de politique monétaire de la Fed.
L’inflation, qui a explosé en 2021, était en grande partie due à un choc d’offre et à des pénuries de main-d’oeuvre qui se sont progressivement atténués, a-t-il fait valoir, ce qui rend moins indispensable une atténuation de la demande avec des taux d’intérêt élevés qui pourraient pénaliser dans le même temps l’emploi et la croissance.
Austan Goolsbee estime par ailleurs que les anticipations des consommateurs en matière d’inflation, « bien ancrées », peuvent permettre un ralentissement de la hausse des prix « avec moins de douleur économique que par le passé ».
La Fed a maintenu ce mois-ci les taux des fonds fédéraux dans une fourchette de 5,25%-5,50%, mais une majorité des responsables de la banque, dans leurs projections publiées à l’issue de cette réunion, ont laissé entendre qu’une nouvelle hausse des taux serait nécessaire.