Le spectre d’une imposition généralisée de droits de douane et de l’adoption de mesures protectionnistes, une tendance initiée sous la présidence de Donald Trump, plane au-dessus de l’économie mondiale, suscitant une vive inquiétude quant à ses répercussions potentiellement dévastatrices sur les pays en développement. C’est l’avertissement solennel qu’a émis Pamela Coke-Hamilton, directrice exécutive du Centre du commerce international (ITC), une institution conjointe de l’Organisation des Nations Unies (ONU) et de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), lors d’une déclaration faite à Genève.
Les analyses rigoureuses menées par l’ITC mettent en lumière l’ampleur des perturbations engendrées par l’escalade des tensions commerciales, en particulier le bras de fer économique entre les États-Unis et la Chine. Selon les projections de l’organisation, cette conjoncture pourrait entraîner une contraction significative du volume du commerce mondial, estimée entre 3% et 7%. Parallèlement, le produit intérieur brut (PIB) mondial pourrait accuser un recul de l’ordre de 0,7%. Cette détérioration de l’environnement économique global frapperait de plein fouet les économies les plus vulnérables, dont la fragilité est exacerbée par leur forte dépendance aux exportations à destination des grandes puissances économiques.
« C’est énorme », a insisté Pamela Coke-Hamilton lors d’un entretien accordé à l’agence de presse Reuters, soulignant la gravité de la situation. Elle a précisé que si la spirale de confrontation entre Pékin et Washington venait à s’intensifier davantage, cela pourrait provoquer une réduction drastique de l’ordre de 80% des échanges commerciaux bilatéraux entre les deux géants économiques. Une chute d’une telle ampleur ne manquerait pas d’engendrer des répercussions systémiques profondes, se propageant à travers l’ensemble des secteurs d’activité, de la production industrielle à l’agriculture, en passant par l’industrie textile.
Une Guerre Commerciale Mondiale aux Conséquences Économiques et Sociales Majeures
L’atmosphère d’incertitude et d’appréhension continue de peser lourdement sur les marchés financiers internationaux, alimentée par le flux incessant d’annonces de nouvelles mesures de rétorsion commerciale. Les deux premières puissances économiques mondiales persistent dans leur confrontation par le biais de l’imposition de tarifs douaniers toujours plus élevés, instaurant un climat d’instabilité et d’inquiétude à l’échelle planétaire.
La dernière manifestation de cette escalade est venue de la Chine, qui a annoncé son intention de porter ses droits de douane à un niveau de 125% sur les produits américains importés, et ce, dès le 12 avril. Cette décision constitue une réponse directe à l’annonce précédente des États-Unis concernant un relèvement de la surtaxe douanière appliquée aux produits chinois, désormais fixée à 145%.
Les Pays en Développement : Victimes Collatérales d’une Conflagration Économique
Au-delà des deux protagonistes principaux de cette guerre commerciale, ce sont les nations en développement qui courent le risque de subir les conséquences les plus dévastatrices. « Les droits de douane pourraient avoir un impact bien plus néfaste que la suppression de l’aide étrangère », a averti avec force Pamela Coke-Hamilton. Elle a insisté sur le fait que les progrès économiques laborieusement réalisés ces dernières années par de nombreux pays du Sud pourraient être anéantis par cette vague protectionniste.
Des économies particulièrement fragiles et dépendantes du commerce international, telles que celles du Lesotho, du Cambodge, du Laos, de Madagascar ou encore du Myanmar, se retrouveraient contraintes de réévaluer et de réorienter en profondeur leurs stratégies commerciales. Pour pallier la perte d’accès à une part significative du marché américain, ces nations pourraient être amenées à renforcer leurs liens commerciaux au niveau régional, explorant de nouvelles opportunités au sein de leurs zones géographiques respectives.
Le Cas du Bangladesh : Un Exemple Éloquent de Vulnérabilité
Le Bangladesh, qui se positionne comme le deuxième plus grand exportateur mondial de vêtements après la Chine, illustre de manière frappante la vulnérabilité des pays en développement face à ces mesures protectionnistes. Selon les projections établies par le Centre du commerce international, le pays pourrait enregistrer des pertes d’exportations annuelles vers les États-Unis pouvant atteindre 3,3 milliards de dollars d’ici à l’année 2029, dans l’hypothèse où les droits de douane américains de 37% resteraient en vigueur au-delà de la suspension temporaire de 90 jours initialement décidée par Donald Trump.
Face à cette menace économique substantielle, le Bangladesh pourrait être contraint de rechercher activement de nouveaux débouchés commerciaux, notamment sur le continent européen, où les marchés présentent encore un potentiel de croissance significatif, selon l’analyse de Pamela Coke-Hamilton.
Des Prévisions Assombries par un Climat d’Incertitude Persistant
Il est crucial de noter que les prévisions du Centre du commerce international ont été élaborées sur la base de données recueillies antérieurement à l’annonce d’une trêve douanière partielle de 90 jours par la Maison Blanche. Il est important de souligner que cette suspension ne concerne pas les droits de douane déjà imposés à la Chine, ni les augmentations tarifaires qui pourraient être mises en œuvre dans les semaines à venir.
Dans ce contexte de tensions commerciales persistantes et d’incertitude quant à l’évolution des politiques protectionnistes, l’ITC lance un appel pressant à une vigilance accrue quant aux conséquences globales de ces mesures. Si aucune action n’est entreprise pour inverser cette tendance inquiétante, les pays en développement pourraient être entraînés dans une spirale économique descendante dangereuse, menaçant des décennies de progrès en matière de développement et de réduction de la pauvreté.