Est-ce que s’inquiéter d’une guerre commerciale finit par causer des dommages économiques?
La question vient à l’esprit à la lecture des récents rapports portant sur les perspectives économiques. Bien souvent, le risque d’une guerre commerciale figure en haut de la liste des surprises défavorables. Le dernier en date est fourni par la Commission européenne qui, dans ses Prévisions de printemps, stipule que «les différends commerciaux pourraient faire dérailler l’expansion actuelle». Le message ne pouvait être plus clair.
Bien que vivement débattue, l’action reste limitée car la marge de manœuvre a été laissée à la négociation. Cela a apporté un soulagement mais également des déclarations fermes, dans les deux sens, dans le cadre des négociations de l’Alena ou, plus encore, du bras-de-fer entre les États-Unis et la Chine.
S’inquiéter des mesures protectionnistes ou d’une rupture des accords commerciaux en place depuis de nombreuses années peut agir, au final, comme un frein économique même si pour l’instant rien ne change. La raison est que les menaces et les contre-menaces augmentent l’incertitude.
S’inquiéter du protectionnisme augmente l’incertitude parce que l’évolution économique dans un scénario de « non-guerre » serait très différente de celle d’un scénario de guerre commerciale. Dans ce dernier cas, quatre effets peuvent être envisagés :
- Effets directs à court terme : ralentissement de la croissance, augmentation de l’inflation
- Effets indirects à court terme : les entreprises frappées par les droits de douane à l’importation essayeront d’exporter davantage vers d’autres pays. Les droits de douane, qui constituaient d’abord un problème bilatéral, finissent par devenir une question multilatérale touchant de nombreux pays.
- À plus long terme, les investissements directs étrangers peuvent également souffrir lorsque la compétitivité des exportations d’un pays souffre de mesures protectionnistes imposées par un autre.
- Enfin, les chaînes de valeur mondiales seront également modifiées, les entreprises cherchant à minimiser l’impact de l’augmentation des droits de douane.
En outre, le manque de clarté du calendrier de la décision d’augmenter ou non les droits de douane est une autre source importante d’incertitude.
Les différences importantes dans les résultats, selon le scénario retenu, soulèvent des incertitudes, et un manque total de visibilité sur la durée de la situation aggrave les choses.
Pourquoi l’incertitude agit-elle comme un obstacle? La réponse tient en grande partie à l’irréversibilité des décisions.
Pour cette raison, les entreprises retarderont les investissements et l’embauche, tandis que les ménages reporteront les dépenses importantes.
L’incertitude pèsera également sur les prix des actifs et pourrait pousser les banques à se montrer plus prudentes au moment d’accorder des prêts.
Quantifier ces effets est impossible car la psychologie joue un rôle important. Il ne fait cependant aucun doute qu’une période prolongée de tensions commerciales pourrait, via le canal de l’incertitude, peser sur les perspectives de croissance