L’Opep et ses alliés, dont la Russie, ont décidé jeudi de s’en tenir à une augmentation modeste de leur production de pétrole en mai et de renoncer à l’utilisation des données de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), signe d’une dégradation des relations avec l’Occident.
L’Opep+ va augmenter sa production d’environ 432.000 barils par jour (bpj) en mai.
Le groupe informel formé par l’élargissement de l’Opep à plusieurs autres gros producteurs de brut continue ainsi de résister aux appels des Etats-Unis et de l’AIE à accroître l’offre pour faire baisser les cours, dopés par la guerre en Ukraine et les sanctions occidentales contre Moscou.
L’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis (EAU), qui disposent de la majeure partie des capacités de production non-employées au sein de l’Opep, justifient ce refus en expliquant que le groupe ne doit pas se soucier de politique mais seulement de l’équilibre entre l’offre et la demande mondiales.
« L’Arabie saoudite va chercher à éviter une confrontation avec la Russie au moment où la production russe est en difficulté », estime Callum Macpherson, d’Investec.
De son côté, l’administration Biden envisage de puiser jusqu’à 180 millions de barils de pétrole dans les réserves stratégiques des Etats-Unis et l’AIE doit se réunir vendredi pour débattre d’une initiative similaire collective.
Le cours à terme du baril de Brent perdait près de 4% vers 14h00 GMT à 108,82 dollars. Il avait dépassé 139 dollars le 7 mars, du jamais vu depuis 2008.
L’Opep+ a averti que l’économie mondiale subirait un coup dur si la guerre en Ukraine devait perdurer.
« Le moral des consommateurs et des entreprises devrait baisser non seulement en Europe mais aussi dans le reste du monde, si l’on ne tient compte que de l’impact inflationniste que le conflit a déjà provoqué », a déclaré le groupe dans un rapport interne consulté par Reuters.
L’OPEP+ REPROCHE À L’AIE UN MANQUE D’OBJECTIVITÉ
Le Comité technique conjoint qui conseille l’Opep+ a décidé mercredi de cesser d’utiliser les données de l’AIE et de les remplacer par les études de deux sociétés privées, Wood Mackenzie et Rystad Energy.
Le Comité utilise ce type de données pour estimer la production pétrolière et le respect par les pays concernés de leurs engagements.
L’AIE conseille les pays occidentaux en matière de politique énergétique et les Etats-Unis sont le premier contributeur à son budget.
Dans un communiqué, l’AIE a déclaré que ses données et ses analyses étaient « rigoureuses et objectives ».
Le mois dernier, elle avait relevé de 800.000 bpj son estimation de la demande mondiale, à un peu moins de 100 millions de bpj.
Certains membres de l’Opep+ ont critiqué les données publiées par l’AIE, qu’ils jugent peu fiables, et lui ont reproché de s’être prononcée contre une augmentation des investissements dans le secteur des hydrocarbures.
Une source proche de l’Opep+, qui a requis l’anonymat, a déclaré à Reuters que l’AIE avait « compromis son analyse technique pour coller à son discours ».
« C’est une évidence lorsqu’on constate les modifications fréquentes de ses rapports récemment et à quel point elle s’écarte d’autres organisations respectées », a-t-elle ajouté.
Le ministre de l’Energie des EAU, Souhaïl al Mazroueï, a déclaré cette semaine lors d’un colloque que les institutions comme l’AIE devaient se montrer « plus réalistes » et éviter de publier des informations « trompeuses ».