Royaume-Uni, le ciel s’assombrit
Il n’y a pas de Brexit heureux. Depuis le 29 mars, qui marque le déclenchement de la procédure de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), l’économie britannique ne tourne plus vraiment rond. Un temps soutenue par la chute de la livre et les injections monétaires, celle-ci multiplie les signes de faiblesse. La remontée de l’inflation entame le pouvoir d’achat des Britanniques, qui freinent leur consommation. Réduits à l’attentisme, les chefs d’entreprise sont plus nombreux à annuler ou reporter leurs investissements. En octobre, la Confederation of British Industry alertait sur la détérioration du climat des affaires dans le commerce de détail et l’industrie, à contre-courant de la tendance mondiale. Conséquence du quasi arrêt des flux migratoires – le sort réservé aux expatriés est toujours en suspens – la construction marque le pas. Les prix réels au mètre carré ont tendance à baisser, ce qui n’est jamais bon dans une économie traditionnellement dépendante du cycle immobilier (graphique).
Comment, dès lors, interpréter la hausse du taux d’intérêt de la Banque d’Angleterre voté début novembre ? La lecture du communiqué qui accompagne la décision laisse perplexe. Si les membres du Comité de la politique monétaire réagissent classiquement à des chiffres d’inflation plus élevés, ils expliquent aussi que le Brexit aura pour conséquence d’affaiblir le potentiel, soit le rythme auquel l’économie peut « croître sans générer de tension inflationniste ». La banque centrale répond donc à un déplacement de la courbe d’offre, alors qu’elle est supposée agir sur la demande. Elle indique que tout resserrement supplémentaire serait « graduel et limité », tout en se préoccupant des risques « considérables » qui pèsent sur les perspectives économiques. En définitive, tout se passe comme si, anticipant des temps difficiles, les autorités britanniques reconstituaient aujourd’hui des marges de manœuvre pour demain.
Jean-Luc Prautat