L’investissement en Afrique Quelles tendances à venir ?
Après avoir reçu 5% des Investissements Directs Étrangers (IDE) mondiaux en 2012, le constat 2016 est mitigé. L’Afrique a reçu en 2016 une part plus réduite, seulement 3% des IDE, dont 73% localisés dans les 10 pays les plus riches en ressources naturelles. Cette baisse s’explique principalement par la chute du coût des matières premières, mais laisse néanmoins émerger une nouvelle tendance parmi les investisseurs.
On constate effectivement un intérêt croissant des investisseurs pour les pays possédant une économie diversifiée, par opposition aux pays possédant uniquement des réserves en ressources naturelles importantes. L’exemple de l’Éthiopie est édifiant. Bien qu’enclavé et faisant partie des pays les moins développés, c’est la 6e économie africaine à avoir reçu le plus d’IDE en 2016, 3.2 Milliards, soit 46% de plus qu’en 2015, et 22 fois plus qu’en 2010 ! Cette augmentation s’explique notamment grâce aux investissements réalisés ces dernières années pour sécuriser le secteur privé et les capacités de production, renforçant ainsi la confiance des investisseurs dans des secteurs clés pour le développement du pays. Pour continuer à bénéficier de ce regain d’intérêt, les pays africains doivent, à l’image de l’Éthiopie, engager des réformes pour attirer et sécuriser le financement privé, dans des domaines qui favorisent la croissance inclusive.
Cette tendance est réelle et constitue un enjeu majeur puisqu’on estime pour 65 Milliards d’IDE en Afrique pour 2017, en partie dû à la consolidation et à la diversification du secteur privé.
Les capitaux étrangers : un rôle-clé pour le développement du continent
D’ici à 2050, on estime que la population Africaine aura doublé pour atteindre les 2.5 milliards d’individus. C’est pour exploiter pleinement cette explosion démographique qu’il apparaît nécessaire de cibler les secteurs clés de la croissance africaine. Depuis longtemps sollicitée pour ses ressources en matières premières abondantes, l’enjeu majeur pour l’Afrique dans les prochaines années sera d’inverser la tendance en mettant en place une stratégie et un cadre réglementaire pour s’assurer que les IDE s’alignent avec leurs objectifs de développement, notamment en matière de création d’emploi et de croissance durable.
L’investissement dans le secteur privé, et particulièrement dans les PMEs, présente des enjeux considérables. En Afrique, le problème du financement des entreprises se fait ressentir beaucoup plus sur le secteur des PMEs que sur celui des grandes entreprises. Ce dernier bénéficie en effet de la grande majorité des IDE aujourd’hui, mais ne constitue pas pour autant toujours une source d’emplois durables (création d’infrastructures, mise en place des réseaux etc…).
C’est dans cet optique qu’une orientation stratégique des IDE vers le développement des PMEs représente une opportunité conséquente : celle d’une croissance inclusive. Elle permettra alors, en plus de créer de l’emploi, de densifier le tissu économique du continent, et ainsi de favoriser les échanges internationaux.
Néanmoins, il est important de rester lucide sur la possibilité pour certains pays d’attirer des capitaux étrangers. Pour certains pays, particulièrement les Pays les Moins Développés (PMD), l’investissement privé fait encore face à des barrières structurelles. La taille réduite de leur économie et de leur système financier leur bloque l’accès au marché international, limitant considérablement leurs possibilités de croissance. C’est dans ce contexte que le rôle des Aides Publiques au Développement (APD) reste déterminant.
APD et IDE : nécessité d’une action conjointe
Dans certains pays africains, on constate une insuffisance des revenues domestiques générés par l’économie locale pour maintenir une situation pérenne. L’un des rôles essentiels actuellement pour les APD consiste à apporter à ces régions dans le besoin suffisamment d’aides pour lutter contre l’extrême pauvreté. L’investissement privé pour ces pays représente une opportunité énorme pour sortir de la précarité économique, et c’est en cela que les APD doivent aussi viser à mettre en œuvre une dynamique positive en incitant les capitaux privés à affluer. Il est nécessaire de canaliser ces ressources pour stimuler le financement privé et permettre à ces pays d’atteindre leurs objectifs en matière de développement.
De nombreuses initiatives voient le jour, à l’image du Compact For Africa, qui viennent compenser le manque de capitaux propres de certaines régions en Afrique. Il s’agit d’utiliser stratégiquement les APD et les fonds philanthropiques pour mobiliser les flux de capitaux privés vers les marchés émergents, engendrant des effets positifs pour les investisseurs et pour les communautés touchées.
En France, c’est l’AFD (Agence Française pour le Développement), par l’intermédiaire de sa filiale pour le financement du secteur privé, Proparco, qui soutient cette initiative. En 2015, 62% du budget alloué à l’AFD a été utilisé pour l’Afrique, et en 2016, le financement du secteur privé a représenté 14% de son activité globale. Les résultats sont plus qu’encourageant, puisqu’il est estimé en 2015 à 874.000 le nombre d’emplois créés ou sauvegardés par l’intermédiaire des actions de l’AFD.
En bref?
A l’international, l’Afrique se distingue désormais par son économie et non par ses ressources. Pour confirmer cette tendance, les états africains doivent désormais mettre en avant leur volonté de changement de cap en matière de stratégie de développement. Les organismes internationaux, quant à eux, doivent soutenir financièrement les initiatives de consolidation du tissu entrepreneurial africain. La confiance croissante des investisseurs privés dans les startups et PMEs innovantes du continent se traduira par une augmentation des IDE vers l’Afrique et permettra ainsi au continent d’entamer une phase de croissance inclusive, et de s’adapter au mieux à l’explosion démographique des prochaines décennies.