La récente visite présidentielle a marqué une étape décisive dans les relations franco-marocaines, avec un potentiel de plus de 10 milliards d’euros de contrats à la clé, selon certaines sources proches de l’Élysée. Ce montant significatif résulte en partie du changement de position de la France concernant la question du Sahara, un dossier complexe sur lequel la France avait jusqu’ici adopté une attitude hésitante. Cette prise de position a permis de débloquer des projets d’envergure, renforçant la coopération bilatérale et valorisant le rôle stratégique du Maroc comme un point d’ancrage essentiel pour la France en Afrique.
Ces accords constituent surtout une confirmation de l’implication historique de la France au Maroc et de l’importance de ce dernier en tant que porte d’entrée vers le continent africain. Si bon nombre de ces projets sont en préparation depuis plusieurs mois, voire années, ils auraient souffert de l’absence d’une reconnaissance officielle au plus haut niveau. La présence de nombreux chefs d’entreprises françaises lors de cette visite témoigne de l’intérêt économique grandissant pour le Maroc. En effet, les plus grandes entreprises françaises actives dans le pays ont fait partie de la délégation présidentielle, illustrant le dynamisme des échanges économiques entre les deux nations.
L’axe principal de cette coopération renouvelée concerne les infrastructures de transport, avec des projets d’envergure qui vont renforcer les capacités logistiques du Maroc et ses ambitions industrielles. La première annonce majeure est celle d’une coentreprise entre Tanger Med et CMA-CGM pour la création d’un port de transbordement à Nador, orienté vers la gestion des conteneurs. Ce futur terminal, qui viendra compléter un port existant principalement dédié aux activités pétrolières, vise à atteindre une capacité annuelle de 1,2 million d’EVP (équivalents vingt pieds), chiffre ambitieux comparé aux performances du port de Marseille, qui a atteint un record de 1,5 million d’EVP cette année. Ce projet, dont l’investissement avoisine les 280 millions d’euros, renforcera la position de Nador comme hub méditerranéen stratégique. Avec des infrastructures portuaires majeures à Casablanca, Tanger et bientôt Nador, le Maroc capitalise sur son positionnement géographique pour capter une part croissante de la chaîne logistique, tout en sécurisant son développement industriel.
L’extension de la ligne de train à grande vitesse entre Tanger et Marrakech représente une autre avancée significative. Ce projet inclut non seulement la construction de la ligne mais également la fourniture des rames TGV par Alstom et la création ou la rénovation de lignes de transport express régional (TER). La France et le Maroc entendent ainsi développer ensemble un réseau ferroviaire moderne qui non seulement facilitera les déplacements internes mais contribuera également à l’intégration économique du Maroc. Le choix du Royaume de se tourner vers le rail comme levier de croissance durable témoigne de son ambition de s’imposer comme un acteur industriel majeur dans la région.
Le domaine aéronautique, qui s’affirme comme un nouveau pilier de l’industrialisation marocaine après l’essor de l’industrie automobile, est également au cœur des annonces. Safran, motoriste de renom, a ainsi confirmé la création d’un atelier de maintenance de moteurs LEAP à horizon 2026, renforçant la capacité du Maroc à répondre aux besoins de sa flotte aérienne. Cette nouvelle installation vise à maintenir les moteurs de dernière génération qui équipent de nombreux Airbus et le Boeing 737 Max, ouvrant la voie à un potentiel accord entre Royal Air Maroc (RAM) et Airbus pour l’achat de nouveaux appareils. Cet investissement pourrait marquer un tournant pour RAM, dont la flotte, principalement constituée de Boeing vieillissants, nécessite un renouvellement. Cet atelier contribuera à renforcer les ambitions de RAM en Afrique, en adéquation avec la stratégie royale de captation de parts de marché africaines.
Les autres annonces marquantes portent sur les énergies vertes, en particulier le développement de l’hydrogène vert et des centrales solaires. Ces initiatives sont essentielles pour répondre aux exigences de décarbonation des grands groupes industriels internationaux, de plus en plus sensibles aux critères écologiques. La production d’une énergie plus propre au Maroc permettra non seulement de soutenir son développement industriel mais aussi d’aligner le pays sur les standards environnementaux mondiaux, garantissant ainsi son attractivité pour les entreprises étrangères. De tels investissements profiteront également aux sous-traitants français et devraient accélérer la croissance du commerce bilatéral, qui a déjà augmenté de 5 % l’an passé.
En définitive, ces accords témoignent de la stratégie de repositionnement de la France en Afrique, désormais articulée autour de son partenariat privilégié avec le Maroc. Nombre de groupes français ont déjà établi leur siège pour l’Afrique au Maroc, confirmant son statut de plateforme régionale stratégique. Cette évolution des relations bilatérales efface également plusieurs maladresses diplomatiques passées de la France, illustrant la capacité du roi Mohammed VI à mener une politique de long terme. Le monarque, qui aspire à positionner le Maroc comme un acteur clé dans l’essor économique de l’Afrique, incarne cette vision d’un continent destiné à devenir le moteur de la croissance mondiale.
La visite retour du roi Mohammed VI en France, prévue pour 2025, s’annonce déjà comme un événement marquant, où l’accueil protocolaire prendra une dimension symbolique. Ce respect des traditions reflète les valeurs du Royaume et met en avant la stature de son souverain, qui voit dans ce partenariat un vecteur de développement mutuel et de reconnaissance pour l’Afrique sur la scène internationale.