Un concert haut en couleur marqué par des chants spirituels inouïs interprétés par une centaine d’artistes.El Hadhra a ébloui le public d’Hammamet. Les férus de la culture soufie ont ainsi savouré le Hadhra lors d’un récital poignant. Ce grand un spectacle coloré et inédit nous a entraîné vers une douce et sensuelle hypnose. Une confrontation entre l’héritage traditionnel et celui du monde contemporain sera, d’emblée, mise en valeur lors de cette soirée inoubliable.Une scène pleine et surchauffée, où des hommes et des femmes en costume traditionnel qui interprétaient, accompagnés de divers instruments, les chants et hymnes des soufis.La visée du travail de Fadhel Jaziri dans la Hadhra 2015 n’est pas la fixation d’un folklore teinté de mysticisme et de nostalgie, vécu comme une fuite hors du contemporain. Elle est la mise en scène de la mémoire dans le théâtre du présent, la lutte de la musique contre la dispersion du temps dans une unité créatrice.
Les chants sont comme une mélopée, une plainte triste et lancinante. C’est une expression puissante et sincère. Mais à d’autres moments, les chants sont alertes, rythmés, entraînants : c’est certes de la musique soufie, mais qui vous donne envie de bouger et de danser. Les musiciens nous ont fait découvrir une autre façon de faire de la musique. Ils utilisaient leurs instruments pour appuyer et projeter leurs voix et les instruments murmuraient comme leurs voix. Leurs voix et leurs mots ressemblaient parfois à des sons tirés d’instruments plutôt qu’à des sons produits par la parole. Les chants enivrants de Hédi Donia, Karim Chouaieb, Ali Jaziri, Riadh Sghaier et Sami Rezgui viennent s’ajouter aux instruments. La communion est immédiate avec le public. Les morceaux s’enchaînent sans temps mort. Le rythme s’accentuait avec ces danseuses qui sillonnent la scène. Les you you des femmes fusent de partout.Alignées, vêtues de la tenue traditionnelle, parées de leurs plus beaux atours, les jeunes danseuses exécutent leurs chorégraphies en se balançant, pour remémorer en une longue ondulation aux courbes sinueuses, le mouvement des vagues de l’océan.. Toujours portés par l’énergie et la générosité caractéristiques de cette compagnie, les choristes, les danseurs et les musiciens explorent les multiples possibilités des corps. Partir des corps, de leurs mouvements, de leurs appuis, leurs équilibres, pour en révéler leurs allures, leurs flux, leurs allées et venues, leurs rencontres, leurs co-présences, leurs co-existences. Encore une fois Fadhel Jaziri excelle dans son scénario. Le public attentif est enivré de ces belles images et de ces chants soufis.Les artistes ont réussi à replonger les mélomanes noctambules dans un passé lointain, celui notamment de la convivialité spirituelle réussie grâce aux philtres dont seule le chant soufi en possède les fulgurances.
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